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herbert spencer. — études de sociologie.

la cérémonie devient une preuve encore plus forte de soumission. C’est pourquoi l’offre de présents se transforme en une reconnaissance formelle de la suprématie. Dans l’ancien Vera Paz, « dès qu’un roi était nommé… tous les chefs des tribus se présentaient eux-mêmes ou envoyaient des parents… avec des présents. Ils déclaraient (au moment de la proclamation) qu’ils approuvaient son élection et l’acceptaient comme roi. » Chez les Chibchas, quand un nouveau roi montait sur le trône, « les principaux de la tribu prêtaient le serment d’être des vassaux obéissants et fidèles, et, comme preuve de leur soumission, chacun lui donnait un bijou ainsi qu’un certain nombre de lapins, etc. » Toribio dit des Mexicains : « Chaque année, à certaines fêtes, les Indiens qui ne payaient pas d’impôts, même les chefs, offraient des présents aux souverains, en signe de subordination. » De même au Pérou : « Personne n’approchait Atahualpa sans apporter un présent comme témoignage de soumission, et, quoique ceux qui venaient fussent des hommes nobles et puissants, ils entraient portant les présents sur le dos et sans souliers. » Deux récits que nous trouvons dans les annales des Hébreux montrent bien, par leur contraste, que l’offre de présents implique la soumission. Il est dit de Salomon : « Il régnait sur tous les rois depuis le fleuve jusqu’au pays des Philistins et jusqu’à la frontière de l’Égypte, » et aussi « que tous les rois de la terre venaient auprès de Salomon et apportaient chacun des présents… une certaine quantité tous les ans. » D’autre part, il est écrit que, lorsque Saül fut choisi pour roi, les enfants de Bélial dirent : « Comment cet homme pourra-t-il nous protéger ? Et ils le méprisèrent et ne lui apportèrent pas de présent. » Dans les pays les plus reculés de l’Orient, les présents apportés au chef suprême ont toujours la même signification. Dans le Japon, « c’était le devoir de tous les seigneurs de venir et de présenter leurs respects à la cour impériale une fois par an, quand ils offraient des présents ; » de plus, « le monarque séculier présente ses respects et ses devoirs une fois par an au mikado… par une ambassade solennelle et par de riches présents. » Eu Chine, les présents sont des signes évidents de soumission. À côté de la mention qu’ « à l’installation du grand khan quatre mille messagers et ambassadeurs, chargés de présents, assistèrent à la cérémonie, » nous lisons que les officiers mongols demandèrent aux Franciscains députés par Innocent IV « si le pape savait que le grand khan était le fils du ciel et que la suprématie sur la terre lui appartenait de droit… quel présent ils avaient apporté de la part du pape au grand khan… » La manière dont on interprétait l’acte d’offrir des présents au roi de Burmah est également significative. D’après Yule, on fit de