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bibliographie.ranvier. Histologie du système nerveux .

doit admettre que la section a porté sur un nerf différencié. Mais, dans un petit nombre de cas, l’arrêt ne serait que temporaire, et voici, d’après M. Romanes, ce qui se passerait : Les ondes contractiles parties des ganglions arrivent au niveau de la section qui a déterminé l’arrêt ; « étant alors subitement interceptées, un violent conflit de forces moléculaires se produira à l’endroit où ces ondes sont bloquées, et chacune d’elles cherchera pour elle-même la ligne de moindre résistance ; c’est pourquoi, comme des ondes successives viennent frapper continuellement et régulièrement le lieu d’obstruction, un trouble moléculaire plus ou moins grand se répandra également à travers les lignes de décharge, qui d’abord n’étaient que presque suffisantes pour maintenir la continuité physiologique du tissu. Ainsi… chaque onde qui est arrêtée impose à ces lignes particulières de décharge un degré d’activité fonctionnelle beaucoup plus élevé que celle qu’elles ont eu jusqu’à présent à exercer ; à son tour, cette activité engendrera sur une perméabilité plus grande, et tôt ou tard le moment arrivera où ces lignes de décharge, d’abord presque capables, seront devenues tout à fait capables de transmettre une excitation moléculaire, suffisante pour aller provoquer des ondes contractiles au delà du point où celles-ci étaient interceptées tout à l’heure. » — « Dans quelques cas, ajoute M. Romanes… j’ai pu fixer d’une manière certaine la ligne précise à travers laquelle avait eu lieu l’irruption de l’influence stimulatrice ; de sorte que ces derniers faits tendent, je crois, à confirmer puissamment la théorie de M. Spencer sur la formation des nerfs… Une théorie scientifique de l’évolution des nerfs qui, il y a un an, paraissait impossible à vérifier, parce que les observations qui auraient pu la démontrer eussent exigé plusieurs centaines d’années, est donc maintenant établie par des observations qui ne demandent que des heures et des minutes. »

Ce n’est pas seulement à l’Aurélia aurita que M. Romanes applique cette théorie (qui est pour lui un fait) des lignes de décharge. Si elle est exacte et suffisante pour expliquer la genèse des nerfs en général, elle ne peut manquer de l’être quand il s’agit d’expliquer la genèse du plus haut produit de révolution : le cerveau de l’homme ; « de sorte que dans l’hypothèse spencérienne, savoir : que les lignes de décharge deviennent de plus en plus définies par l’usage, nous avons une explication physique (aussi complète, peut-être, que saurait. jamais l’être une telle explication) de la genèse de l’esprit. »

U.

L. Ranvier. Leçons sur l’histologie du système nerveux. Paris, Savy, 1878.

Nous ne voulons ni juger ni analyser les deux volumes que M. Ranvier vient de publier. Ils ne rentrent pas dans le cadre de cette Revue. Mais il n’est peut-être pas sans intérêt, au point de vue de la biologie générale ou de la théorie de l’évolution, de signaler quelques faits découverts dans ces dernières années, que M. Ranvier rapporte