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ANALYSESmagy. — La Raison et l'Ame.

gènes ; d’une cause première intelligente dérive une pluralité de forces harmoniques. Ainsi la loi fondamentale de la raison résulte de la relation de l’âme à la cause première du monde (p. 232-247).

II. Essai sur la nature de l’âme humaine. — C’est moins une étude nouvelle qu’une application particulière de la théorie précédente. Aussi suffira-t-il d’indiquer la marche générale de l’argumentation.

Suivant sa méthode ordinaire, M. Magy examine les divers modes d’action de l’âme successivement dans la sphère de la science, de l’art, de l’industrie, de la vie organique, de la vie morale, de la vie sociale, et il établit ainsi les deux lois suivantes : la loi de la lutte, l’âme est toujours en lutte avec l’objet de son action ; la loi de la règle, l’âme agit toujours selon des lois. De la première loi il conclut que l’âme est une force ; et de la seconde, qu’elle est une force simple, car la plus générale des lois qui règlent son action est précisément la loi d’homogénéité et d’harmonie. L’âme est donc une force simple hyperorganique (p. 251-275).

D’autre part, la matière prise en soi n’est pas étendue ; l’étendue est une notion subjective ; elle naît de la réaction psychologique contre l’action des corps extérieurs, comme l’espace naît de la réaction psychologique contre l’action des forces intérieures de l’organisme. Mais, en vertu de la loi objective de la connaissance, si nous ne concevons pas la matière comme étendue, nous devons la concevoir comme un composé de forces. L’opposition de l’âme et du corps se réduit « à l’opposition du simple et du composé », et l’action s’exerce directement de l’un sur l’autre. L’action de la force hyperorganique ne trouble point le dynamisme de la matière et n’altère pas l’invariabilité de la force vive. Car l’âme « transforme en pensée l’action que le cerveau lui a communiquée et la restitue sous forme de mouvements organiques » (p. 275-338).

Enfin les deux lois qui révèlent l’essence de l’âme, en révèlent aussi les caractères spécifiques. En même temps que l’âme agit selon des règles, elle les connaît, et, par elles, elle connaît le système du monde, et Dieu, cause des êtres et principe de la raison. En même temps que l’âme lutte contre son objet, elle a conscience de son effort et se sent libre. Tels sont les deux caractères distinctifs de l’âme, qui fondent sa dignité propre et sa suprématie sur les autres forces de la nature : « elle est une force autonome sous la souveraineté de Dieu » (p. 339-419).

III. Telles sont les conclusions de cette œuvre considérable, d’une belle ordonnance, d’une forme élégante et précise, où se retrouvent la plupart des qualités qui ont assuré au précédent ouvrage de M. Magy un légitime retentissement. Il ne peut être ici question de l’apprécier en détail ; mais le système en lui-même appelle quelques brèves réflexions.

Il est formé de trois éléments divers que l’on peut ainsi caractériser : l’idée de force à base matérialiste ; l’idée de liberté morale, à base spiritualiste ; l’idée de l’homogénéité universelle, à base panthéistique. En