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analyses. — ch. robin. L'instruction et l'éducation.

Ch. Robin : L’instruction et l’éducation, in-12. Paris. Decaux.

La science du caractère serait bien utile à l’éducation où il s’agit de trouver les moyens de façonner les caractères d’après des types donnés, suivant la pensée de Bain : type d’activité, de sensibilité ou d’intelligence. Cette science n’est pas faite et celle de l’éducation aussi est encore à faire, comme le faisait remarquer il y a quelque temps M. Compayré dans un article de la Revue[1]. Cependant les livres de pédagogie abondent en ce moment, et le livre de Herbert Spencer notamment dont il a été rendu compte ici et dont la traduction française vient de paraître réalise un grand progrès. En même temps que cette traduction paraissait, M. Charles Robin recueillait en un volume sous ce titre l’Instruction et l’Éducation divers articles publiés, en 1876, dans la Philosophie positive. Par certaines vues, cet ouvrage se rapproche de celui de l’auteur anglais, il n’en a malheureusement pas les qualités de méthode, la profondeur philosophique et les agréments dans la forme. Mais l’auteur n’a pas voulu donner un livre dogmatique, c’est plutôt une série de renseignements, comme il le dit lui-même. Pourquoi les a-t-il donnés d’une manière aussi fruste, pour nous servir de l’expression même d’un de ses admirateurs cité dans la préface ? Il y a, en outre, bien des digressions politiques et religieuses qui ont trait à la polémique courante et ne sont pas du domaine de la philosophie pure. Enfin ! cassez l’os et exprimez la moelle des meilleures pensées, nous dira-t-il. Et c’est en effet là la vraie critique : critique des qualités, quand il y en a, plutôt que des défauts.

M. Robin distingue à propos l’éducation et l’instruction, tandis que Herbert Spencer sous le titre de l’Éducation traite des deux choses. « L’éducation, dit-il, est ce que la société tire des qualités naturelles et acquises, tant intellectuelles que morales de l’homme… » « L’instruction est ce que chacun, seul ou à l’aide des autres, fait entrer dans son esprit, ajoute à ses propres facultés naturelles, construit et institue à leur aide. » La distinction n’est peut-être pas très-nette et est un peu arbitraire. En réalité, l’instruction est avant tout un moyen d’éducation, mais le terme d’éducation est plus large et s’applique non-seulement au développement de l’intelligence par l’instruction, mais au développement des sentiments, des facultés morales et même des facultés physiques. Faire de l’enfant un homme dans toute la force du mot, tel est le but de l’éducation. Comme Spencer, M. Robin est d’avis qu’on doit apprendre d’abord à l’enfant ce qui est utile à la conservation de l’individu, et met en premier lieu l’exercice des cinq organes des sens. De là l’utilité des leçons de choses qui apprennent aux enfants à bien voir, à observer. L’instruction scientifique ne doit commencer que vers l’âge de quatorze ans. Alors, par les renseignements de la science, on apprend à penser pour mieux agir. Et l’instruction doit contenir l’étude des notions biologiques et sociologiques nécessaires à tous. Cette

  1. N° de février 1877.