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analyses. — froschammer. Die Phantasie, etc.

ments répondent au rêve que fait en lui, que réalise par lui l’imagination créatrice.


3e Livre : Développement de l’imagination devenue subjective : l’esprit conscient de lui-même ; la personnalité, humaine. — Dans la troisième partie de son ouvrage, l’auteur s’élève de l’animal à l’homme et s’efforce d’expliquer, par ses principes, notre nature sensible, intellectuelle et morale. — En premier lieu, l’apparition de l’homme doit être rattachée au développement de l’univers, ses rapports avec la nature le prouvent, l’unité de la science l’exige. Il marque un moment décisif du progrès universel ; il est le chef-d’œuvre de l’imagination créatrice, qui travaille les éléments matériels en se conformant à leurs lois, mais qui, dans cette lutte de plus en plus, les domine et les contraint d’exprimer ses idées, de traduire ses conceptions. Ou l’organisme primitif avait une tendance à produire l’homme à travers tous les degrés, toutes les espèces, toutes les générations successives, si bien que la vie était faite pour l’humanité, comme dans la plante, la tige et les feuilles n’existent que pour la fleur et le fruit ; ou, dès le principe, un seul des organismes primitifs, peut-être aussi plusieurs d’entre eux, possédaient cette tendance à l’exclusion de tous les autres. En tout cas, l’homme est l’œuvre suprême de la puissance qui crée les organismes, et son esprit n’est que le dernier degré de la conscience, que prend peu à peu, dans ses efforts successifs, l’esprit immanent au monde.

Le dualisme de la matière et de l’esprit se retrouve dans l’homme comme dans la nature. Mais il ne faut pas admettre deux âmes, Tune qui anime le corps, l’autre qui préside à la vie spirituelle. Ces deux âmes n’en font qu’une : c’est la puissance créatrice des formes vivantes qui, devenue consciente d’elle-même, donne naissance à toutes les facultés de l’esprit, à la sensibilité, à l’intelligence, à la volonté. Ces trois facultés ne peuvent être confondues, mais leur action simultanée dans la plupart des phénomènes psychologiques prouve assez qu’elles dérivent d’un principe commun et que leur pluralité n’exclut pas l’unité de l’âme. Déjà, dans les organismes vivants, l’imagination objective laisse entrevoir les trois forces primitives, qui deviennent les facultés de l’âme : « Il y a d’abord la force plastique, dont le rôle est de déterminer la forme (das eigentlich gestaltende, plastiche Moment) ; il y a en second lieu la force téléologique, qui met l’harmonie entre les parties élémentaires, qui en forme un tout, qui les fait se mouvoir en accord ; il y a enfin la force agissante, le principe même du mouvement ; ces trois forces se distinguent et en une certaine mesure se séparent dans l’âme, où elles deviennent la sensibilité, l’intelligence, la volonté[1]. »

La meilleure manière d’établir tout à la fois et l’unité essentielle de

  1. Le mot force ne traduit peut-être pas très-exactement ici le terme das Moment. L’auteur veut dire, si nous comprenons bien sa pensée, qu’on peut distinguer par l’analyse dans l’acte complexe de l’imagination créatrice trois actes, qui, en devenant indépendants dans l’âme, constituent ses trois facultés.