Les corporations organisent la production honnête sous la responsabilité
collective et avec le concours de tous les membres, concours
précieux pour les apprentis et les serviteurs (p. 213). Le moyen âge
est donc particulièrement favorable à l’entr’aide économique industriel
commercial ou politique (indépendance des cités). Mais le pouvoir
religieux et royal viennent arrêter l’élan solidariste. La centralisation
exige la ruine des associations. La Révolution de 1789 elle-même
est individualiste à outrance (p. 240).
Heureusement les survivances de l’assistance mutuelle sont nombreuses, par exemple en Suisse, dans le Midi de la France, où les biens communaux abondent et où l’agriculture est en partie œuvre commune (p. 255-267). Les m^els russes n’ont pas disparu ; le village turc est encore domine par des traditions d’entr’aide ; et de même la djemmàa arabe (p. 289j. Enfin la faveur dont jouissent les syndicats, les coopératives, les associations de secours mutuels, de bienfaisance, d’assistance (p. 305) montre que l’entr’aide est plus que jamais un facteur d’évolution sociale. Mères de famille, paysans, ouvriers, tout le monde s’entr’aide au lieu de lutter et de chercher à s’entredétruire. La nature montre ainsi dans quelle voie se développera la moralité sociale (p. 315-326).
L’auteur n’a pas montré combien parfois funeste à la liberté, à la justice est la solidarité dont il a loué avec raison le rôle capital dans l’évolution animale et humaine. Son tableau est presque sans ombres, et le parti-pris avoué de ne pas insister sur les phénomènes de lutte, de concurrence, d’oppression, a empêché l’étude de l’entr’aide malfaisante. La réaction contre l’individualisme, la libre concurrence, la lutte pour l’existence érigée en principe de morale, n’en est pas moins légitime ; et il n’eût peut-être pas été déplacé de montrer plus longuement dans l’entr’aide la base d’une sélection (au détriment des « oiseaux de proie ») supérieure à celle que permet le struggle-for-life.
G.-L. DUPRAT.
A. Prins. — De l’esprit du gouvernement démocratique. Essai de science politique. Bruxelles, Misch et Thron, 1905.
Ce livre se compose de quatre chapitres dont chacun constitue une étude complète d’un des principaux problèmes qui se rattachent au gouvernement démocratique : la démocratie et l’utopie égalitaire, la démocratie et le principe majoritaire, la démocratie et le suffrage universel, la démocratie et les institutions locales. Les trois premiers chapitres sont d’un caractère critique et négatif, dans le quatrième l’auteur expose le moyen propre selon lui à remédier au mal engendré par le gouvernement démocratique. 11 est juste de dire que l’auteur se défend d’être un adversaire du régime démocratique. Seulement, il y