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ANALYSESfr. harms. — Die philosophie seit Kant..

tières qu’il traite. Nous avons été frappé de l’attention studieuse avec laquelle sa parole était recueillie par ses élèves ou ses auditeurs.

Le livre de M. Harms reproduit toutes les qualités qu’il montre dans sa chaire. Ce qui le distingue avant tout, et ce qui nous plaît particulièrement à nous autres Français, c’est sa parfaite et constante clarté. Je ne dis pas qu’il n’y ait rien d’artificiel dans sa manière d’exposer les doctrines, de les diviser, de poser et d’extraire les questions, de mettre en relief les points qui l’intéressent, dans les proportions qu’il accorde à chaque système. Ceci, du reste, tient au fond même de son livre. Ce qui est évident, c’est le talent et l’habileté avec lesquels il sait distribuer, exposer et apprécier les matières qu’il étudie.

Ses jugements sont contestables ; mais sa manière de les exprimer est toujours intéressante et accompagnée de réflexions judicieuses. Il se borne à tracer les grandes lignes et écarte les détails inutiles qui pourraient nuire à son plan. Aussi son livre se lit d’un bout à l’autre avec un vif intérêt. Il peut prétendre à la popularité que ses compatriotes dédaignent un peu trop, s’il ne satisfait pas toujours aux conditions de la science la plus rigoureuse. Nous autres Français, quand nous rencontrons ces qualités dans un livre allemand ainsi écrit et composé, nous le saluons avec reconnaissance, et nous en savons un gré infini à son auteur. Reste à savoir si nos voisins le jugent assez profond ; ce qui n’est pas obscur leur étant toujours un peu suspect et bien près de manquer du caractère scientifique ou philosophique.

Quant à ce qui concerne le fond même de ce livre, nous n’avons pas la prétention de le juger en un si court espace. Nous en dirons cependant notre avis et nous ferons seulement quelques réflexions sur chacune des parties dont il se compose.

Nous l’avons lu avec beaucoup d’attention. Or, nous déclarons que l’auteur ne nous a nullement convaincu quant à la thèse qu’il soutient et qu’il croit pouvoir démontrer à l’aide de l’histoire. Les raisons qu’il donne, malgré tous les mérites que nous avons signalés, ne nous ont point paru de nature à faire triompher cette opinion que paraissent partager avec lui un certain nombre d’esprits, sur le caractère moral et historique de la philosophie allemande.

Qu’il nous permette d’abord une légère chicane sur le titre même de son livre : « La philosophie depuis Kant ». Un mot de plus eût été nécessaire à l’égard des étrangers. L’auteur sans doute n’a cru s’adresser qu’à ses compatriotes. C’est être trop modeste ; mais, puisque l’œuvre de M. Harms a franchi ses frontières naturelles, il faut qu’on sache ailleurs qu’il ne s’agit que de la philosophie allemande. L’auteur, on l’a vu, étudie son caractère et son développement dans ses principaux systèmes et non-seulement dans ceux qui ont paru depuis Kant, mais dans ceux qui l’ont précédé. Il débute même par une longue introduction sur laquelle nous ferons aussi quelques remarques.

Pourquoi, dans un volume consacré à la philosophie « depuis Kant », s’étendre si longuement sur ses antécédents ? C’est, nous dit-on, parce