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PHILOSOPHES CONTEMPORAINS


M. RENOUVIER
ET
LE CRITICISME FRANÇAIS[1]

V

Problème de la synthèse totale des phénomènes.

Il faut d’abord montrer que des bornes sont imposées au savoir : le positivisme l’affirme, mais sans pouvoir établir philosophiquement son affirmation. Le criticisme le prouve en se fondant sur l’étude logique et psychologique de la connaissance.

La connaissance est relative : elle ne porte et ne peut porter que sur des phénomènes et sur des rapports de phénomènes, ou plutôt les phénomènes, c’est-à-dire les représentations et leurs lois fonctionnelles, sont la réalité elle-même dont les catégories constituent les rapports les plus généraux. Voilà ce que M. Renouvier a établi en s’appuyant plus particulièrement sur le principe du nombre. Il faut maintenant faire un pas de plus et reconnaître que la science, non-seulement la science humaine, mais celle d’un être aussi intelligent que possible, est forcément et nécessairement limitée. Nous disons limitée et non contradictoire, car l’usage des catégories n’implique aucune contradiction, aucune antinomie. Il est vrai qu’elles se posent par thèses et antithèses et qu’elles semblent ainsi, au premier abord, incompatibles avec le principe d’identité : mais les thèses et antithèses sont des termes abstraits et corrélatifs qui ne s’appliquent séparément, dans la rigueur de leur signification pure, à aucune autre représentation qu’à celle d’eux-mêmes[2]. Rien ne nous est réellement offert que comme synthèse, et l’unique but de la

  1. Voir le numéro précédent de la Revue philosophique.
  2. Logique générale, III, 279, seconde édition.