Page:Revue philosophique de la France et de l'étranger, III.djvu/268

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
258
revue philosophique

On ne peut donc arguer contre Fechner de l’impossibilité où il a été de trouver la confirmation de sa loi dans les phénomènes de la sensibilité calorique.

Pour les raisons énoncées plus haut, je ne m’occuperai pas de la pression, agent sensible auquel conviennent un grand nombre des remarques qui viennent d’être faites à propos de la chaleur et du froid. Il est encore indécis d’ailleurs si les phénomènes de pression confirment oui ou non la loi logarithmique, et je serais tenté de croire que, dans certaines limites, ils lui sont favorables. Seulement les expériences auraient peut-être besoin d’être recommencées. Ce qui a été dit de la température s’applique à plus forte raison aux odeurs et aux goûts. Sans doute l’irritation de la muqueuse nasale est d’autant plus vive qu’un parfum est plus concentré ; mais nous sommes ici dans des conditions encore bien plus désavantageuses que quand il s’agit de chaleur. On ne voit même pas comment on pourrait évaluer la concentration d’un parfum, au point de vue, bien entendu de son action sur le nerf olfactif ; et quant au jugement sur le contraste ou la différence, on peut douter qu’il s’élevât beaucoup au-dessus de la constatation d’une différence, et qu’il pût porter sur une égalité même approximative. Parlerons-nous des saveurs ? elles fournissent des sensations bien autrement obtuses. Cela ne veut pas dire cependant qu’un jour on ne trouve peut-être des méthodes ingénieuses écartant toutes ces difficultés ; pour le moment nous devons bien avouer notre impuissance.

Restent les impressions de l’ouïe. M. Hering a voulu enlever à Fechner le bénéfice de la loi, si anciennement connue, de l’élévation du son proportionnelle au logarithme du nombre de vibrations. Il prétend que c’est encore aujourd’hui une question non résolue de savoir si le plus ou moins de gravité d’un son appartient à l’extension ou à l’intensité de la sensation. Pas n’est besoin d’entrer dans une pareille discussion. La physique nous apprend que la hauteur d’un son dépend exclusivement du nombre de vibrations que le corps sonore exécute dans l’unité de temps. Si l’on a fait entendre immédiatement l’un après l’autre deux sons d’une tonalité différente, entre lesquels par conséquent il y a un certain contraste — l’intervalle est par supposition d’une quinte (ut, sol) — et si l’on veut obtenir entre le son le plus élevé et un troisième son () le même contraste, puis encore une fois ce même intervalle de quinte entre ce troisième son et un quatrième (la), et ainsi de suite, on constatera que les nombres de vibrations croissent suivant une progression géométrique ; ils seront, par exemple, 16, 24, 36, 54, 81… Y a-t-il moyen de ne pas