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la suite par la déclaration que le développement apparent n’est qu’un changement de direction dans l’éternel mouvement de rotation, nous avons cependant ici la reconnaissance d’une disposition logique objective qui ne pourrait jamais résulter du chaos d’une dialectique réelle antilogique. Ici Bahnsen ne peut plus recourir au subterfuge que c’est uniquement une substance individuelle qui développe son essence individuelle dans ce processus ; car, à son point de vue pluraliste, c’est une somme de substances séparées et indépendantes l’une de l’autre qui sont les supports du développement. Bahnsen entreprendrait en vain de démontrer comment en ce cas un résultat individuel pourrait se produire sans l’immanence d’un principe logique ; faire simplement une pareille tentative, cela exigerait l’esprit philosophique borné d’un matérialiste, et Bahnsen est bien loin d’avoir un tel esprit.

Si donc la logique immanente est absolument nécessaire pour le développement historique, il est prouvé également par là qu’elle est aussi indispensable pour le développement individuel, puisque l’individu organique est composé d’individus d’un ordre inférieur, précisément de la même manière que le peuple ou l’État sont composés d’individus d’un ordre bien plus élevé, et puisque les premiers exigent une raison directrice aussi bien que ces derniers. La relativité du concept de l’individualité montre le plus clairement que la raison universelle objective ne peut pas être, comme Bahnsen le croit, quelque chose de partiel, mais doit être quelque chose d’absolument général qui ne plane pas seulement au-dessus des relations des individus entre eux pour les régler et les coordonner, mais qui appartient à l’essence même de chaque individu.

Bahnsen lui-même arrive à cette conclusion. Il dit : « Si dans le processus universel, il se trouve quelque chose de correspondant au schéma logique fondamental, cela peut seulement être, parce que et en tant que la Volonté renferme un caractère logique en elle-même et dans son essence prise dans son sens le plus rigoureux. La concession faite ici conditionnellement devient définitive, puisque Bahnsen lui-même reconnaît la condition posée comme remplie. Si Bahnsen admet ainsi qu’en fait la volonté renferme dans son essence un caractère logique, la conséquence va de soi que le développement de cette essence intime n’est pas autre chose que le développement du principe logique ; et il exprime cette opinion en disant que la volonté développe sa propre essence en moyens, buts intermédiaires et finaux. D’après tout cela, Bahnsen se voit indirectement forcé de reconnaître précisément ce qu’il a entrepris de combattre dans son écrit, à savoir le caractère logique du contenu de la volonté ainsi que