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e. de hartmann. — un disciple de schopenhauer.

logiques fondés sur la perception et la mémoire ; mais dans les trois cas, leur apparition et leur essence sont conditionnées par la logique objective et subjective. Considérés au point de vue de la philosophie de la nature, tous les procédés psychiques sont conditionnés par des processus matériels entre les cellules et les molécules du cerveau, c’est-à-dire par des mouvements de réaction entre les individus d’un ordre inférieur qui constituent l’organisme ; et ces derniers phénomènes à leur tour sont soumis à des lois logiques de la nature. De quelque façon donc que l’on considère la question, nous devons regarder comme une tentative vaine celle de vouloir exclure du domaine de la raison un domaine quelconque du macrocosme ou du microcosme.

D’ailleurs cette tentative d’exclusion augmente encore les difficultés de l’individualisme. Aussi longtemps que tout antagonisme entre les directions de la volonté — que celles-ci appartiennent à un individu ou à plusieurs — est regardé comme réaldialectique, aussi longtemps la différence entre le macrocosme et le microcosme n’est pas mis en discussion ; mais dès que l’on fait rentrer l’antagonisme des forces de différents individus et de différents atomes dans le domaine des lois logiques de la nature, on renonce du même coup à une dialectique réelle pour le macrocosme, et on essaie seulement de maintenir une dialectique réelle pour le microcosme. Et cependant il est évident que l’opposition macrocosmique des forces est le type (symbolique) de l’opposition microcosmique, ou en d’autres termes que les tendances opposées l’une à l’autre dans le microcosme se montrent comme éléments constitutifs du microcosme, exactement dans le même sens que les microcosmes opposés l’un à l’autre produisent précisément par cette lutte la réalité du macrocosme.

La connaissance de la relativité du concept de l’individualité élève cette vague analogie à un jugement certain et même le système du monde, tel que Bahnsen l’a établi, est basé originairement sur le maintien de cette analogie. S’il était vrai que les individus actuellement existants fussent les produits d’une scission intérieure de la volonté primitivement une et identique, cette scission intérieure se continuant également dans les individus aurait nécessairement en eux les mêmes effets, c’est-à-dire elle diviserait indéfiniment la substance en parties infiniment petites. Mais si la scission intérieure de la volonté ne peut pas produire dans le microcosme une rupture de l’unité substantielle, alors elle n’a pas non plus eu ce pouvoir dans le macrocosme ; c’est-à-dire que l’unité de la substance subsiste encore aujourd’hui malgré sa scission intérieure, c’est-à-dire