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allemands, notamment Bartels, ami de Gauss, avait commencé à publier des essais sur les fondements de la géométrie. Sa Géométrie imaginaire parut dans les mémoires de l’université de Kazan de 1835 à 1838. Par une méthode différant notablement de celle de Bolyai, il arrivait aux mêmes résultats.

Le nom donné par Gauss à la nouvelle théorie — non-euclidienne — est le plus clair ; mais il faut bien l’entendre dans ce sens, que la géométrie est refaite en substituant au postulatum d’Euclide, un postulatum différent plus général, qui comprend le premier comme cas singulier. Bolyai dit « scientiam spatii absolute veram » ; emploi impropre d’un terme métaphysique. Le terme de géométrie imaginaire de Lobatchewsky est encore plus malheureux ; si en effet, comme nous le verrons, l’emploi du symbole √—1 présente certains avantages dans les calculs de la nouvelle géométrie, ce n’est qu’un accident, ce n’est nullement le caractère fondamental de la théorie, qui n’a même, en réalité, nul besoin de ce symbole. Lobatchewsky lui-même renonça finalement à cette épithète malencontreuse ; son dernier ouvrage est intitulé : Pangéométrie[1]. Depuis les travaux récents, on appelle sa géométrie hyperbolique. Je ne parle pas du terme de géométrie astrale, inventé par Schweikart. Nous verrons ultérieurement à quelles idées correspondent ces différents termes.

Nous n’avons pas à exposer ici l’ordre des déductions de Lobatchewsky ni de Bolyai, mais seulement les conséquences les plus caractéristiques de leur hypothèse, afin de permettre d’établir une discussion métaphysique sur un terrain suffisamment déblayé.

Pour plus de facilité de langage, nous désignerons avec Bolyai par système Σ le système de la géométrie euclidienne, par système S, celui de la nouvelle géométrie.

La géométrie de la sphère, c’est-à-dire celle des figures tracées sur la surface de la sphère avec des arcs de grands cercles, est identique dans les deux systèmes.

Supposons une droite en un point de laquelle soit un cercle tangent ; que le centre du cercle s’éloigne de plus en plus indéfiniment, le point de contact restant le même, la circonférence du cercle (système Σ) se rapproche de plus en plus de la droite ; la droite est la limite de cette circonférence, ce qu’on exprime aussi parfois en disant qu’elle est une circonférence de rayon infini.

    di storia délie scienze matematiche e fisiche (Tome II, — mai 1869) du prince Boncompagni.

  1. Pangéométrie ou précis de géométrie fondée sur une théorie générale et rigoureuse des parallèles, par N. Lobatchewsky. Kazan, Imprimerie de l’Université. 1855. En français.