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sent, à admettre pour les coordonnées algébriques et pour les coefficients des équations la forme imaginaire, aussi bien que la forme réelle, et à parler dès lors de points imaginaires, de droites imaginaires; etc.

C’est uniquement aux théories reposant sur ces conventions que l'on devrait, à mon sens, réserver le nom de géométrie imaginaire.

C’est bien de géométrie qu’il s’agit ici, et le but final est, bien entendu-, d’arriver à établir des théorèmes ou à résoudre des problèmes sur des figures réelles. Les démonstrations y sont souvent très-brèves, mais elles restent malheureusement incompréhensibles pour qui n’est pas initié à la véritable signification du langage conventionnel qu’on y emploie. En tout cas, il n’y a jamais là au fond, sous un déguisement plus ou moins pénétrable, que de l’algèbre appliquée à la géométrie. Grâce aux conventions qui ont été faites pour le langage, on évite d’écrire certaines équations et d’opérer sur elles les déductions nécessaires au raisonnement. Mais, en fait, il y a toujours des relations entre quantités réelles, qu’on doit supposer tout d’abord avoir été transcrites sous formes algébriques avec l’emploi du signe V-1, puis retraduites dans le langage conventionnel de la géométrie imaginaire. Ce n’est donc qu’un artifice logique plus ou moins curieux; il n’y a rien qui puisse, en réalité, intéresser le métaphysicien spéculant sur la notion d’espace.

Mais avant d’aborder un nouvel ordre d’idées, il est indispensable que nous précisions le rôle des quantités imaginaires en algèbre. Nous le ferons en exposant le principe de la représentation géométrique des quantités imaginaires, principe essentiellement différent des conventions dont nous venons de parler. Ici ce n’est plus une application de l’algèbre à la géométrie ; ce serait plutôt l’inverse. C’est l’emploi de schémas géométriques spéciaux comme support de raisonnements intuitifs sur des relations purement abstraites.

Reprenons la conception fondamentale de Descartes; soit deux quantités, fonction l’une de l’autre, c’est-à-dire telles que chacune d’elles a, pour chaque valeur déterminée de l’autre, une ou plusieurs valeurs également déterminées.

Nous pouvons nous représenter les variations d’une quantité quelconque par les changements de position d’un point sur une droite indéfinie à partir d’une origine fixe sur cette droite ; en d’autres termes, la longueur d’une droite déterminée est pour nous le schéma d’une quantité déterminée quelconque. Si, de nos quantités U, V, fonctions l’une de l’autre, nous représentons de la sorte la première par une longueur (abscisse) x portée sur une droite fixe ou axe à