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suppose-t-il pas plutôt ? Nous ne voulons pas insister, mais tout cela nous paraît peu solide.

Que l’histoire nous montre en action ces énergies natives et le développement de ces puissances innées dans l’individu et dans l’humanité, rien de mieux. Mais l’idée, et l’idée seule, explique le penchant, la tendance, la faculté. Autrement celle-ci n’a pas de valeur et ne se conçoit pas. Ce n’est pas à un hégélien que nous l’apprenons. Il nous semble l’avoir oublié. Bref, s’il fallait ne trouver que là une base solide à la science du beau et à la philosophie de l’art dont nous venons de voir retracer l’histoire, elle risquerait fort d’être incertaine et chancelante. En voulant la consolider l’auteur l’aurait ébranlée. Heureusement il n’en est rien et toute son histoire proteste et se dresse contre sa théorie. On peut dire de l’auteur ce que Leibniz dit de certains logiciens ou métaphysiciens : « il cherche ce qu’il a et il a ce qu’il cherche. » La définition de cette science, elle est dans l’idée elle-même qui est une des faces de la raison. Elle est dans l’évolution même de cette idée et dans son développement total, telle que son histoire nous la montre. Elle est l’alpha et l’oméga de tous ces systèmes, de toutes ces théories, de celles qui la nient comme de celles qui l’affirment et cherchent à la déterminer. Il en est de la science du beau, comme de celle du vrai et, du bien, de la métaphysique, de la logique, de la morale et du droit naturel. Elle a sa place dans l’organisme de la science. Un sytème, quel qu’il soit, ne la crée, ni ne l’établit. Il la reconnaît, l’analyse et la met à sa place. Puis il l’applique et en fait voir le développement, les conséquences. ; il en tire la solution de tous les problèmes. Vouloir l’établir autrement est une tentative aussi impossible qu’inutile.


VIII


Quant au jugement général que nous devons nous-même porter sur ce livre, nous en avons suffisamment signalé les mérites et les défauts pour que nous n’ayons pas à y revenir. D’ailleurs, tant que nous n’aurons pas l’œuvre totale, ce jugement ne peut être complet ni définitif. Mais de l’examen que nous venons de faire, il nous est permis de tirer une conclusion générale relativement à la double tendance que nous avons indiquée au début de cet article et qui nous paraît être le caractère le plus saillant de l’esthétique nouvelle. C’est par là que nous voulons terminer.

Cette conclusion ressort de ce qui précède.

Le dessein nettement accusé de l’auteur est de combiner en-