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ch. bénard. — l’esthétique de max schasler

encore plus maltraité que l’auteur du Phèdre et du Banquet. L’antipathie de M. Schasler pour tout ce qui est idéal abstrait ou porte l’empreinte de la pensée mystique, l’a complètement aveuglé sur les grands côtés, l’originalité et la fécondité de cette doctrine. Il a aussi fermé les yeux sur le mouvement imprimé aux esprits. Les vices de la méthode dans les écrits de Schelling, la forme de l’exposition, les variations de la pensée, les contradictions, les abus de la diction trop poétique, etc., voilà ce qui le frappe et ce qu’il signale. Le reste pour lui n’est rien ou peu de chose. Finalement il conclut sur Schelling en disant que l’esthétique lui doit beaucoup moins qu’on ne croit. C’est une injustice, une faute très-grave dans cette histoire : elle ne peut se pardonner à un historien qui retrace la genèse de la conscience esthétique.

Nous aurions bien d’autres observations à faire ; mais il faut s’arrêter et nous aimons mieux terminer cette revue rapide en renouvelant nos éloges, que ces critiques ne peuvent ni contredire ni atténuer.


VII


Quel est le résultat auquel aboutit toute cette histoire ? Quelle conclusion l’auteur lui-même prétend-il en tirer ? C’est ce qu’il prend soin d’établir dans un fort long chapitre qui termine son ouvrage et qu’il nous reste à examiner.

Le but de cette histoire, on ne l’a pas oublié, c’est : 1° de retracer la genèse de la conscience esthétique ; 2° de trouver dans cette histoire même la base d’un nouveau système d’esthétique.

L’auteur a-t-il atteint ce double résultat ?

Voici comment il s’exprime lui-même à ce sujet. « Le premier résultat, dit-il, qui nous a paru incontestablement le fruit de cette histoire est celui-ci : Elle a montré d’abord que chaque point de vue esthétique qui apparaît dans cette histoire a sa justification, sa vérité relative ; qu’elle doit être considérée comme une pierre qui doit entrer dans l’édifice total ; d’un autre côté, que cette justification, cette vérité partout n’est que relative : d’où la nécessité de s’élever au-dessus d’elle à une vérité plus haute » (p. 1130).

Nous ne pouvons que souscrire à ce jugement dans sa généralité. C’est, en effet, le résultat auquel doit conduire l’histoire de toute science si elle a été philosophiquement conçue, interprétée et jugée selon son véritable esprit de haute et impartiale critique, conforme