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voit sans peine qu’elle gît dans une inconséquence, dans une extension arbitraire, bien que naturelle, de certaines conventions ou définitions. Dans l’expression a — b, a et b sont sans doute quelconques, mais pourtant, au début de la convention, b était plus petit que a ; qu’adviendrait-il, se demande-t-on, si b était plus grand que a ? Cette question est en soi légitime, bien qu’illogique ; et elle aboutit à une énonciation d’un certain nombre de règles sur des transformations de symboles et sur leur interprétation.

C’est le lieu de faire ici une remarque qui, je crois, n’a pas encore été faite : c’est que si la soustraction, qui a donné naissance aux quantités négatives, n’avait pas, en tant qu’appliquée aux quantités négatives, ramené des quantités positives, mais avait engendré une nouvelle espèce de quantités, par exemple, des quantités négatives à la seconde puissance, l’algèbre aurait menacé de s’étendre sans limite, sans jamais cependant sortir du champ de l’addition et de la soustraction.

Après m’être étendu aussi longuement sur les deux premières opérations de l’algèbre, je puis exposer très-brièvement ce qui a trait aux opérations subséquentes.

Multiplication et division. — À l’occasion de l’application des principes de la multiplication aux quantités négatives, se rencontre la fameuse règle des signes — qui n’est pas conventionnelle, comme quelques-uns l’ont affirmé par erreur — mais dont la démonstration aurait peut-être besoin d’être plus rigoureuse. Ce n’est pas ici le lieu d’approfondir ce sujet. Il est seulement à noter que la multiplication par une quantité négative est une opération qui n’a pas de sens raisonnable ; que ce n’est qu’un artifice nécessaire dont il faut user avec prudence, si l’on ne veut pas s’égarer. En voici un exemple comme preuve.

Une compagnie de transport demande un prix a pour transporter des marchandises de Paris à Marseille. Quel sera son prix pour les transporter de Marseille à Paris ?

Mis sous une forme moins naïve, ce problème résolu algébriquement amènerait — a pour réponse. Cela voudrait-il dire que la compagnie doit payer cette somme à l’expéditeur, et lui transporter ses marchandises par-dessus le marché ? Ce serait tout bonnement absurde. Et pourtant il peut se présenter des cas où pareille interprétation serait de rigueur. Si, par exemple, la compagnie, faisant erreur, au lieu de diriger les marchandises sur Marseille, les transportait à Anvers, elle devrait évidemment une indemnité à l’expéditeur. Il ne faut donc pas se hâter de tirer une conclusion quand on tombe sur une solution renfermant des quantités négatives ou, en