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et ses œuvres, considérés alors comme objets d’agrément, de délassement ou de plaisir ? Il fallait qu’on vît clairement qu’eux aussi ont leur haute valeur propre et sont liés aux autres. Mais alors personne ne s’en doutait et on était encore loin du jour où on s’en apercevrait. Les raisons, je le répète, sont donc très-faciles à donner, elles pouvaient être dites plus simplement et plus brièvement.


VI


Nous arrivons à la partie du livre qui est de beaucoup la plus étendue et la plus importante, celle qui est consacrée à l’Esthétique moderne. Elle comprend l’exposé et la critique des travaux de cette science qui, dès lors, ne cessera de produire pendant les deux siècles de son histoire, des théories et des systèmes au sein des diverses écoles. Par malheur, il nous est impossible d’accompagner l’auteur dans la carrière aussi vaste que bien remplie qu’il va parcourir. L’étendue, déjà trop longue, de cet article nous contraint d’abréger notre tâche, au moment où elle offrirait le plus d’intérêt et nous serait sinon plus facile, du moins plus agréable. Nous le regrettons d’autant plus vivement que nous aurions plus à le louer pour les hautes et solides qualités qu’il a montrées dans cette partie capitale de son œuvre. Nous aimerions à lui prouver toute l’estime que nous faisons, pour notre compte, de ce grand et utile travail ; à tempérer par là les critiques que nous croyons devoir lui adresser. Sur beaucoup de points nous serions encore, sans doute, loin d’être de son avis. Surtout en ce qui concerne l’appréciation des doctrines et leurs véritables rapports, il y aurait beaucoup à lui contester. Mais nous ne nous en plaisons pas moins à rendre justice à la manière dont il les comprend et les expose, et à sa critique elle-même. Selon nous cette critique est trop sévère mais toujours élevée, approfondie ; il s’y mêle partout des aperçus féconds et utiles ; des observations justes et d’une rare sagacité lui mériteraient aussi nos éloges ; elles nous forceraient de reconnaître en lui un analyste exercé autant qu’un juge éclairé. S’il n’est pas toujours impartial, il sait, dans les discussions et les digressions peut-être trop multipliées auxquelles il s’abandonne, soulever une foule de questions intéressantes et lui-même indique des solutions profitables au progrès de la science dont il retrace l’histoire. Au lieu de cela, nous devons nous borner à quelques observations très-générales et reprendre la tâche ingrate de signaler encore quelques endroits faibles où cette