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Comment échapper à ce défaut ? Quel sera le remède ?

Ce ne peut être qu’une méthode plus conforme à la nature de l’esprit humain et qui soit capable de rétablir l’accord entre lui et son objet. Selon M. Schasler, cette méthode c’est la méthode expérimentale et inductive dont le procédé initial, essentiel, est l’intuition. Elle seule, l’intuition ou l’expérience, peut mettre l’esprit en face du réel, en communication directe avec lui. Là est le correctif et le contrôle de la dialectique, son contre-poids nécessaire. La dialectique pour cela n’abdique pas, elle conserve toute sa légitimité, son importance, sa supériorité même, mais elle doit se combiner avec l’expérience. En un mot, la combinaison intime du procédé spéculatif et du procédé inductif, l’induction jointe à la déduction, l’a priori à l’a posteriori, telle est, dans sa généralité, selon M. Schasler, la méthode qui doit servir à fonder ou à renouveler la science et la philosophie dans toutes ses parties, la science du beau en particulier. De cette façon, les deux grands systèmes qui apparaissent dans son histoire, l’idéalisme et le réalisme, pourront s’accorder ensemble et se donner la main. On aura un système nouveau qui pourra s’intituler réel-idéalisme (Realidealismus).

Mais comment et à quelles conditions doit s’effectuer cet accord ? Dans quelle mesure et selon quelle loi les deux procédés doivent-ils se combiner ? Quel rôle doit jouer l’expérience ? Quelle place est réservée à la spéculation ? Là est la difficulté. Nous doutons que le réalisme, surtout le positivisme actuel, soit satisfait des conditions que notre auteur lui propose. Ce serait le sujet d’un long débat entre ces écoles, sur la nature, le nombre, les rapports et la gradation des facteurs de la science humaine. Ce qui est proposé, du reste, est donné comme résultat de l’analyse de la pensée et des modes essentiels de la connaissance. Mais on doit s’attendre à ce qu’ici l’hégélianisme tout entier reparaisse. Ainsi : 1° M. Schasler maintient ce qui en est la base, le mouvement dialectique de l’idée ; 2° c’est d’après la loi de ce mouvement qu’il détermine la nature et le rang des trois termes de la connaissance qui sont les trois degrés de l’évolution. — Nous ne pouvons qu’indiquer cette théorie qui s’impose à l’œuvre entière de l’auteur, à l’ensemble et à toutes ses parties, mais nous devons appeler sur elle l’attention.

Les trois moments de la connaissance qui se pénètrent et dont l’inférieur conduit au supérieur sont : 1° l’intuition immédiate ou l’expérience sensible ; 2° la connaissance réfléchie ; 3° l’intuition médiate ou conciliée, la pensée spéculative, qui coordonne, dirige et transforme les deux autres. La sensibilité (Empfindungkraft), l’entendement (Verstand), la raison (Vernunft), sont les trois facultés