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LE RÉGIME ALIMENTAIRE DES COLLÉGIENS

III

Difficulté d’établir scientifiquement la ration d’entretien. — Depuis longtemps déjà, mais surtout depuis une vingtaine d’années, les questions relatives à l’alimentation normale ont beaucoup occupé les hygiénistes. On s’est avisé que l’homme ne mangeait pas scientifiquement, qu’il composait ses repas beaucoup plus d’après ses goûts, ses instincts et ses habitudes, que d’après des données rationnellement établies. Alors que dans l’élevage de nombreux animaux domestiques, la ration quotidienne de chaque sujet est fixée en rapport avec le travail qu’on lui demande, alors que pour les chevaux en particulier[1] des études physiologiques bien conduites ont permis de modifier le régime au grand avantage de ces quadrupèdes, et en réalisant de très appréciables économies au profit des éleveurs, l’alimentation de l’homme reste livrée au hasard. Dans les grandes agglomérations d’hommes, soumis à l’usage de rations quotidiennes, ces rations sont calculées sans tenir aucun compte, ou à peu près aucun compte, des différences individuelles ; et dans l’armée par exemple, tandis que le cheval de grosse cavalerie est autrement nourri que le cheval de cavalerie légère, le fantassin, l’artilleur, le cuirassier reçoivent tous une ration identique. Il y a là une anomalie douloureuse qui prouve une fois de plus combien l’homme est plus attaché à ses intérêts pécuniaires qu’aux soins de son corps et de son esprit, et qui tient aussi — nous allons le voir immédiatement — aux difficultés de la question. Le problème, en effet, est difficile, non seulement à résoudre, mais même à poser.

La première chose à faire serait de fixer ce qu’on appelle la ration d’entretien. À première vue, la chose semble simple à comprendre : la ration d’entretien, c’est l’ensemble des substances alimentaires qui, en dehors de tout travail et en santé normale, suffisent à un homme pour se maintenir dans son état physiologique. Pour peu que l’on réfléchisse à cette définition, on ne tardera pas à s’apercevoir qu’elle cache au milieu de ses

  1. Landouzy, L’alimentation rationnelle, conférence faite à la Sorbonne, mars 1908.