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UN ENSEIGNEMENT PRIMAIRE JANSÉNISTE DE 1711 À 1887

Sainte-Geneviève cette fois, — dans une maison de la rue Saint-Jacques. Elle trouva alors (1815) un chef nouveau, le frère Bonaventure Hureau, nommé « supérieur général » par les administrateurs jansénistes. À cette époque, les amis de Port-Royal étaient encore puissants, et quelques-uns d’entre eux tenaient une place élevée dans la société royaliste libérale : Royer-Collard, Guéneau de Mussy, Silvy ; Camet de La Bonnardière, ancien membre de la Chambre introuvable, et l’un des serviteurs des Bourbons les plus inféodés au régime ; enfin Ambroise Rendu. Ce dernier, l’un des administrateurs des écoles Tabourin, s’était signalé, en 1814, parmi les ennemis les plus ardents de Napoléon, et la Restauration avait fait de lui, d’abord un inspecteur général, puis son procureur général à la Cour de Paris. Grâce au crédit de ces éminents protecteurs, la « Société des écoles chrétiennes » fut autorisée (23 juin 1820) comme « association charitable en faveur de l’enseignement primaire ». Elle reçut des legs et des donations de particuliers, des subventions publiques. La ville de Paris lui confia plusieurs écoles communales ; elle établit, — ou rétablit, — des instituteurs dans plusieurs localités voisines de Paris, à Saint-Lambert près de Chevreuse, à Linas, à Étampes, a Pithiviers, à Troyes. « Le clergé, assure M. Gazier, ne lui était pas hostile. » Ce régime dura vingt-deux ans encore. Ce ne fut qu’en 1842 que vint la décadence, par la faute, assure M. Gazier, du supérieur Hureau. Comme, cependant, Hureau, propriétaire de Port-Royal, le vieux domaine sacré de la petite église Janséniste, paraît avoir été un Janséniste fort fidèle, il est permis de supposer qu’il y eut alors, dans le groupe, de plus en plus réduit, des « appelants », un petit schisme intérieur dont l’histoire, si notre hypothèse est exacte, ne manquerait pas d’intérêt. Peut-être aussi, — et cette seconde conjecture mériterait également d’être vérifiée, — le caractère janséniste, affirmé avec une imprudente franchise, des frères enseignants de la montagne Sainte-Geneviève fut-il pour quelque chose dans la décomposition finale de l’institut.

En effet, c’est à Saint-Lambert qu’émigra d’abord, — en 1837, — le noviciat des Frères : en plein pays janséniste, dans ce village, situé à mi-chemin de Port-Royal et de Chevreuse, dont Tillemont illustra la cure, — dont le cimetière avait reçu en 1711, après