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DE LA DICTÉE COMME MOYEN D’ENSEIGNER L’ORTHOGRAPHE

des exercices scolaires, doive être totalement supprimée ? En aucune façon, mais elle doit être faite autrement et dans un tout autre but.

« Les dictées graduées avec discernement, disait déjà une circulaire ministérielle du 20 août 1857, analysées au point de vue des idées, du sens des mots, de l’orthographe, dictées ayant pour objet un trait d’histoire, une invention utile, une lettre de famille, un mémoire, le compte-rendu d’une affaire, etc. tel doit être, dans l’école primaire, le fondement de l’enseignement de la langue. » À part le mot « fondement », sur lequel il y a peut-être à faire quelques réserves et qu’il ne faudrait pas entendre dans un sens trop exclusif, on ne pouvait mieux dire. La dictée, en effet, peut apprendre tout autre chose que l’orthographe : elle peut être l’étude approfondie d’un passage d’auteur choisi par le maître en vue d’un but bien déterminé. Sans doute ce passage pourrait être pris dans un livre ; mais le maître aura rarement à sa disposition un nombre de livres suffisant pour pouvoir en mettre un entre les mains de chaque élève. Et puis copier, n’est-ce pas lire plusieurs fois ? Toujours les élèves s’appliqueront davantage à ce qu’ils auront écrit, et qui doit rester, qu’à ce qui n’aura que frappé passagèrement leurs oreilles ou leurs yeux. Donc, au lieu de tirer ses dictées d’un livre les unes à la suite des autres, ou de les prendre dans le journal que chaque semaine lui apporte et dont le rédacteur n’a pas pu prévoir les besoins spéciaux de ses élèves, qu’il se préoccupe avant tout de chercher ce qui a trait aux choses qu’il leur importe le plus de connaître. Chaque fois qu’il trouve dans ses lectures une idée juste, utile, intéressante, exprimée en termes simples et clairs, qu’il n’hésite point à en faire le sujet d’une dictée, puisque ce sera pour lui le moyen de meubler et d’enrichir leur esprit. Après leur en avoir lu le texte et après avoir appelé leur attention sur les difficultés orthographiques qu’il comporte, qu’il le dicte et explique le sens de tous les mots qu’ils pourraient ne pas comprendre ; qu’enfin il leur fasse remarquer comment ces mots se lient pour former des phrases, disant bien ce que l’auteur a voulu dire, et il leur aura vraiment appris du français. Et la dictée aura été ce qu’elle doit être : un exercice d’écriture courante, un moyen d’affermir les enfants dans l’habitude de bien mettre l’orthographe, soit usuelle,