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REVUE PÉDAGOGIQUE

écoles sont intéressantes surtout en tant qu’instruments de la civilisation générale, seront contents de voir signaler. Quelquesuns des désavantages allégués ne méritent guère qu’on les discute ni en France ni en Angleterre. Des personnages éminents se sont plaints à moi que l’éducation populaire en France était déjà portée si loin, que la société commençait à en être ébranlée ; que le laboureur ne voulait plus rester dans son champ, ni l’ouvrier dans son atelier ; que tous les laboureurs voulaient être ouvriers et tous les ouvriers commis. C’est là le langage que nous avons tous entendu souvent chez ceux qui croient que le progrès social est compromis parce qu’une fermière a de la peine à trouver une fille de cuisine. Il suffit de dire, à ceux qui tiennent ce langage, que c’est une folie d’espérer que les classes inférieures auront la bonté de rester ignorantes et de renoncer à une amélioration de leur sort simplement pour leur épargner des ennuis. Mais il y a d’autres inconvénients qui sont plus sérieux. Je déclare hardiment qu’un homme d’État anglais ou français aurait raison d’hésiter à organiser une éducation nationale, si on devait lui prouver que le résultat inévitable de cette organisation sera de produire certains effets qui se sont déjà produits ailleurs, en Prusse, par exemple, et en Amérique.

Je ne parlerai qu’avec respect d’une nation importante, qui a fait de grandes choses avec de petits moyens, et de qui dépend l’avenir de l’Allemagne. Je ne peux pas donner ici le développement nécessaire à ce que j’ai à dire d’elle ; je dois m’en rapporter au jugement des meilleurs observateurs de l’Europe. Je dis que le peuple prussien, avec son système d’éducation, est devenu un peuple studieux, un peuple docile, un peuple instruit, si on veut, mais aussi un peuple quelque peu pédant, un peuple quelque peu frelaté. Je dis que cette pédagogie, ce formalisme ôte quelque chose à la force vitale d’une nation. Je dis que par ces défauts un peuple perd une grande partie de ce génie naturel, de cette rude vigueur primitive qui sont le grand élément de force des nations.

Je parlerai avec plus que du respect, avec une vive sympathie, d’une grande nation de race anglaise, et de qui dépend, dans une large mesure, l’avenir du monde. Avec son énergie de caractère, avec le champ illimité qui s’ouvre à ses entreprises, le peuple