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dans les écoles primaires, on croirait assister à une discussion de la loi de 1882, si celle du Comité de 1792 ne se terminait par ces lignes presque naïves : « On répond (à Vayron, qui demandait que « les parents trouvassent dans les petites écoles la continuation de l’enseignement religieux donné dans la maison paternelle ») que les maîtres séculiers n’ont jamais dû enseigner ce qui concernait le dogme ; que cette fonction, rejetée ou négligée par les prêtres d’autrefois, ne le serait sûrement pas par les prêtres constitutionnels, et qu’ainsi on ne devait pas donner aux malintentionnés la satisfaction de croire qu’on retirait absolument la religion à la surveillance de ses ministres. » (P. 122.)

On remarquera, dans la séance du 18 avril (p. 187), la première apparition officielle du mot instituteur, qui vient remplacer celui de régent ; le secrétaire du Comité n’a malheureusement pas prévu combien on lui aurait su gré de quelques lignes motivant cette substitution, proposée sans doute par Condorcet : il nous donne sans autre détail l’acte de naissance du vocable nouveau qui devait passer si vite et pour toujours dans la langue : comme si, par une justice des mots, l’instituteur devait être un des plus modestes, mais un des premiers serviteurs de la Révolution.

En continuant à feuilleter le volume au moyen de l’Index alphabétique, — indispensable auxiliaire dans un ouvrage de ce genre, — on arrive à la séance du 21 avril, et l’on voit dans quelles circonstances dramatiques le rapport de Condorcet fut lu à la tribune de l’Assemblée.

Par une coïncidence dont on retrouve plus d’un exemple durant la Révolution, dit M. Guillaume (p. 249, note), c’était au moment le plus aigu d’une crise où le bruit des armes semblait devoir tout dominer que le rapporteur du Comité d’instruction publique avait pris la parole. La lecture de son rapport, en effet, avait été coupée en deux par la déclaration de guerre au roi de Bohême et de Hongrie. Le 19 avril, le président de l’Assemblée avait reçu du roi un billet lui annonçant qu’il se rendrait à la séance le lendemain à midi et demi. Le vendredi 20 avril, la séance de l’Assemblée s’ouvrit à l’heure ordinaire, c’est-à-dire à midi. Bien qu’elle sût que le roi allait venir et que le motif de sa visite fût des plus graves, puisqu’il s’agissait d’une déclaration de guerre, l’Assemblée pensa que sa dignité lui commandait de vaquer à son ordre du jour jusqu’à l’arrivée du chef de l’État. En conséquence, Condorcet monta à la tribune et commença la lecture de son rapport.