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REVUE PÉDAGOGIQUE

richesse de son inventaire, accorde à l’auteur, M. Antony Rouillet, une médaille de cinq cents francs. Elle décerne deux médailles de mille francs : l’une, à MM. Müller et Cacheux (n° 5), dont les plans bien étudiés jettent sur ce qu’ils appellent, dans leur langue d’hommes d’affaires, le côté pratique du sujet, d’utiles lumières ; l’autre, à M. Charles Berteaux, docteur en droit, procureur de la République à Romorantin (n° 7), à qui le temps sans doute a manqué pour assurer à son mémoire la tenue de composition et la force d’expression qui donnent à la pensée tout son relief, mais dont l’esprit droit et ouvert a bien saisi certains traits du sujet, et qui en résume avec accent l’idée essentielle, lorsqu’il dit : « Au milieu qui tue la famille substituons un milieu qui la vivifie. »

En même temps qu’elle appelait l’attention publique sur l’un des moyens de relever l’existence morale des ouvriers dans les villes, l’Académie choisissait pour sujet du prix quinquennal de dix mille francs fondé par le baron de Beaujour : l’Indigence et l’Assistance dans les campagnes. Quelle était, il y a cent ans, quelle est aujourd’hui la condition des populations rurales ? Quelle part leur a été faite dans nos lois d’assistance ? Quelles réformes nouvelles y aurait-il lieu de poursuivre ? Même pour ceux à qui il ne déplaît point de médire de leur temps, il serait difficile aujourd’hui d’évoquer sans invraisemblance l’image du paysan de La Bruyère. L’augmentation croissante des salaires agricoles, la diffusion de l’instruction, la vulgarisation des meilleurs engins de culture, le développement des voies de transport qui font circuler dans l’économie du corps social le produit du travail comme un sang nourricier, tous ces progrès dont le bénéfice s’est étendu aux régions jadis réputées inaccessibles, ont profondément modifié le sort de l’ouvrier rural. Tout autre est d’ailleurs la misère des villes et la misère des campagnes. A la ville, la misère, trop souvent greffée sur le vice et entretenue par le désordre, transmise de génération en génération comme une lèpre, a je ne sais quoi de douloureux qui glace le cœur même de ceux qui la soulagent. Soit qu’elle s’étale, soit qu’elle se cache, on sent qu’elle a des profondeurs incurables, et le contraste du luxe au milieu duquel elle se perpétue en rend le spectacle plus saisissant. A la campagne, on l’a dit avec finesse, ce qui se