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REVUE PÉDAGOGIQUE

nouveau. Il s’agissait d’examiner, non le fond, mais la forme des emprunts publics opérés aux XVIIIe et XIXe siècles dans les trois pays qui étaient, au XVIIIe siècle surtout, les maîtres du crédit européen, la France, l’Angleterre et la Hollande, et de montrer quelle avait été sur cette forme l’influence des institutions et des mœurs. Les deux facteurs de l’emprunt ont été et seront toujours la nécessité publique et l’intérêt privé : la nécessité que les gouvernements s’imposent en vue de certaines entreprises ou à laquelle ils se laissent réduire par imprévoyance ; l’intérêt, que les particuliers exploitent au mieux de leurs ressources. Mais ils n’en peut aller dans une monarchie absolue comme dans une monarchie tempérée, dans une monarchie tempérée comme dans une république. Le tableau des procédés suivis pour les emprunts depuis deux siècles nous montre : en Hollande, les grandes villes, formées en confédération, apportant à la conduite des finances de l’État les habitudes du commerce, combinant leurs opérations coloniales dans le secret, abusant de leur or pour fomenter l’intrigue dans les cabinets de l’Europe, succombant bientôt sous le poids de la défiance qu’elles ont amassée, non moins que sous la masse des engagements qu’elles ont contractés, glissant d’expédients en expédients et ne se relevant que le jour où le nouveau crédit se fonde, à l’inverse de ce qui avait paru faire la force de l’ancien, sur le contrôle public d’un parlement libre ; — en Angleterre, la bourgeoisie, maîtresse de la richesse mobilière, imposant ses conditions aux ministres emprunteurs et surveillant l’emploi de ses fonds, mais peu à peu, dans l’ivresse de la puissance, laissant les emprunts s’accumuler sans souci de la fortune publique qu’ils compromettent, revenant plus tard à la sagesse avec une égale force de réaction et s’attachant à ces deux principes devenus les lois du crédit britannique : la régularité de l’amortissement et la substitution de l’impôt à l’emprunt ; – en France, les rois disposant, trop souvent selon leur bon plaisir, de l’aisance de leurs sujets, les financiers, endosseurs de l’emprunt, jouant avec les contrôleurs généraux à qui se trompera le mieux, sans pitié pour ceux qui paient ; puis, sous l’influence d’un Turgot, d’un Necker, de cette école de bons citoyens que le souffle de 1789 fit sortir de tous les rangs de la société, l’esprit public se réformant lui-même, -