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UNE EXPÉRIENCE D’EXTERNAT

Il peut y avoir évidemment, dans le nombre, des élèves qui, livrés à eux-mêmes, songent plutôt à s’amuser qu’à travailler. Soit, mais ils en auraient fait autant étant internes, car ils n’auraient guetté que le moment de la sortie pour donner libre cours à leurs sentiments. Et puis d’ailleurs ceux-là sont en petit nombre, pour ne pas dire n’existent pas.

En résumé, j’aime le régime externe. Je m’y suis accommodé au point que, à la fin de ma troisième année, je ne rêve pas le jour de mon départ. L’externat peut être mauvais pour des élèves déjà gâtés. Quant à ceux qui sont doués d’une volonté ferme et énergique, qui ont une bonne nature, je crois qu’ils peuvent trouver les moyens de se perfectionner, d’élargir le cercle de leurs connaissances, de devenir meilleurs et de prendre l’école en bonne part. Car ne t’y méprends pas, il n’y a pas que des fleurs à l’école normale. Il faut de l’énergie pour s’y habituer.(M.)

La plupart ne se bornent pas d’ailleurs à ces appréciations générales. Ils font ce qu’ils appellent une sorte de confession. Il y a plusieurs de ces examens de conscience qu’on ne peut lire sans un mouvement d’estime et de sympathie. Qu’on en juge par les trois fragments ci-après :

I. — Le régime de l’externat n’est pas mauvais en lui-même et il présente quelques avantages…

La surveillance est très limitée ; elle est faite la plupart du temps par des élèves de troisième année, ceux — ci traitent leurs camarades sans faiblesse mais avec douceur ; car la vieille coutume de faire des distinctions plus ou moins dédaigneuses pour les derniers arrivés u’existe plus ; on est élève de telle ou telle année, mais on est sur le même pied, et, en ville comme partout, les relations entre condisciples sont des plus cordiales.

L’existence matérielle est assez bonne pour une nature qui sache éviter ce qu’il y a de mauvais. Mais l’existence morale est pleine de périls : une partie de la jeunesse ajaccienne, avec laquelle l’élève-maître peut être en contact, n’est pas suffisamment surveillée des parents, elle n’est pas trop retenue, et cela est vrai pour les deux sexes. On peut tomber dans une mauvaise compagnie ou entrer dans de mauvais rapports ; ce qui a déjà causé quelques victimes. Il y a des logeuses qui surveillent comme des mères de famille, et c’est le plus grand nombre. Mais encore faut-il que l’élève qui se trouve dans ces bonnes conditions fasse des efforts pour résister aux mauvaises tentations du dehors.

En somme, si on a un recrutement d’élèves de volonté ferme et inébranlable, l’externat a des avantages sur l’internat.

Je suis au bout de ma troisième année, et soit par l’étude de la psychologie, soit par l’influence de M. le directeur qui nous rappelle fréquemment nos devoirs, j’ai su éviter toute compagnie pouvant me