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REVUE PÉDAGOGIQUE

pouvoir répondre à toutes les exigences du programme. Nous avons un travail immense et peu d’heures d’étude, de sorte qu’il nous faut veiller souvent jusqu’à 11 heures du soir et nous lever à 4 heures du matin, si nous voulons préparer convenablement nos leçons. Dans ces conditions, il faut certes une forte constitution si l’on ne veut pas succomber.(B.)

On remarque avec plaisir qu’il y en a peu qui se contentent de phrases toutes faites et de vagues généralités. La plupart se jugent ou essaient de se juger en toute sincérité : les uns sont contents d’eux et le disent, les autres hésitent et le disent aussi :

Ne connaissant personne à Ajaccio, n’y ayant ni parents ni amis pour me donner quelques bons conseils, si ce n’est notre directeur, j’ai vu qu’il fallait compter sur moi-même, et dès lors j’ai toujours fait tous mes efforts pour surmonter les obstacles qui se sont présentés. J’ai toujours aimé à être traité en homme (et je n’ai pas à me plaindre à ce sujet) et non en enfant ; je connais ma situation et par suite mes devoirs à remplir. Je sais que je suis à Ajaccio expressément pour atteindre un but, je sais le chagrin que je causerais à ma famille si, par ma faute, je ne l’atteignais pas ; eh bien, il semble qu’après ces considérations, on ne puisse pas faillir à son devoir.(Fa.)

Un autre :

Étant en partie livré à moi-même, tu vas te dire sans doute que la vie morale à l’externat d’Ajaccio doit évidemment en souffrir. Pour moi, je trouve que je me suis convenablement conduit jusqu’ici et je n’ai pas encore eu à me reprocher tant de choses. Du reste, étant obligé de travailler, je n’ai pas grande envie de flâner ou de me livrer à divers plaisirs ! En somme, si j’essaie de résumer ma vie d’élève maître à l’école normale d’Ajaccio, jusqu’ici je ne garde que des impressions incertaines, qui ne me semblent pas mauvaises toutefois, mais qui varient de temps en temps.(F.)

Tous se plaignent sur tous les tons d’avoir infiniment trop à étudier et trop peu de temps pour étudier ; néanmoins ils conviennent que c’est ce surmenage même qui les tient perpétuellement en haleine, et qui est en somme la meilleure sauvegarde de leur conduite. Citons par exemple cette phrase caractéristique :

Mais, me diras-tu, lorsqu’on est externe on rencontre souvent de mauvais camarades avec lesquels on se promène plus qu’il ne faut, on va au café faire la partie à cartes ou à dominos. Cela serait possible si on avait le temps, mais lorsqu’on a des leçons et des devoirs à préparer on ne contracte pas de mauvaises habitudes. Pour mon compte