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L’ÉLECTION DE M. GRÉARD À L’ACADÉMIE FRANÇAISE

livre et qui a eu des éditions répétées : La morale de Plutarque. Mais une fois absorbé par la direction de l’enseignement primaire de la Seine ou pour mieux dire par la création de cet immense service dont il a été le fondateur, l’organisateur et le législateur, beaucoup dirent : Quelle perte ! un si rare talent enfoui dans la paperasse administrative ! Et, en effet, il n’a plus rien écrit pour la littérature. Seulement, cette fois encore, il s’est trouvé que ses rapports, ses statistiques, ses circulaires, tous ces « documents officiels » qui inspirent tant de respect et si peu de curiosité aux amis des lettres, n’étaient rien autre chose que des modèles de la plus pure langue, des morceaux achevés, exquis, fins autant que forts, brillants autant que solides. Bien plus, on y a retrouvé ce caractère qui depuis la fameuse définition de Fénelon passait presque pour disparu : a l’homme qui ne se sert de la parole que pour la pensée et de la pensée que pour la vérité et la vertu ». Cet homme-là, c’est précisément l’auteur des Rapports sur l’enseignement primaire à Paris, l’auteur des Mémoires au Préfet de la Seine et des Notes au Conseil municipal, c’est enfin le vice-recteur qui depuis quelques années lit, à chaque session du Conseil académique, un morceau de la plus rare valeur, qu’il ne songeait pas même à faire imprimer.

La plupart de ces admirables mémoires n’ont paru qu’à titre de documents pour le Conseil, dans cet incommode format des grands in-4° administratifs, qui ne sont ni des livres ni des brochures. L’Académie a bien fait de les signaler au grand public, et les éditeurs qui en ont réuni et publié quelques-uns en volumes, ont rendu un vrai service non seulement à la pédagogie, mais à la littérature française. C’est là que M. Gréard a fait revivre dans tout leur charme, par des merveilles de fine et délicate érudition, les figures à demi effacées de nos éducatrices françaises, depuis le XVIIe jusqu’au XIXe siècle, de Madame de Maintenon à Madame de Rémusat[1]. C’est là qu’il

  1. Au moment même où nous écrivons ces lignes, la maison Hachette publie le premier volume de l’Éducation des Femmes par les Femmes, études et portraits, in-16, par M. Gréard. La Revue entretiendra prochainement ses lecteurs de ce nouvel ouvrage, où l’éminent écrivain a repris et traité d’une façon définitive un sujet dont il s’était déjà occupé à diverses reprises.