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REVUE PÉDAGOGIQUE

nées, où elles croissent, dans le milieu qui leur convient et qui les explique, sur le revers humide du fossé ou sur le sommet pierreux de la colline, avec leur attitude propre, avec l’éclat et les belles couleurs de la vie ! C’est ainsi que nous les font voir nos maîtres, aussi souvent qu’ils peuvent. Or en littérature cela se peut toujours. Ouvrez où vous voudrez un bon écrivain, un de ceux qui pensent fortement et sentent vivement, et vous trouverez autant de figures qu’il vous en faudra, vous les trouverez à leur place, dans la suite et le mouvement du morceau. tirant de ce qui précède et de ce qui suit leur sens et leur valeur. non pas froides et décolorées, mais toutes chaudes et toutes vivantes.

Ne raisonnez pas tant sur le style ; ne dissertez pas tant sur ses qualités ou générales ou particulières ; prenez une page bien écrite, — de telles pages ne manquent pas, Dieu merci, dans notre langue, — faites-la lire, faites-la comprendre, faites-la apprendre : que, bien sue et bien récitée, elle reste dans la mémoire de l’élève comme une belle image de laquelle il rapprochera dans la suite ce qu’il lira et entendra, ce que lui-même écrira. Ainsi se forme le goût : et sur quoi en effet repose le goût, si ce n’est sur la comparaison avec un type bien choisi ?

Ne définissez pas : montrez ; point d’abstraction, mais le concret. Or ici le concret, c’est toute cette admirable littérature française, ample et riche s’il en fut, ou, si vous aimez mieux, pour ne pas vous perdre, un recueil convenablement fait de morceaux choisis, comme il yen a déjà plusieurs.

Voulez-vous tenter un cours d’histoire littéraire ? Que ce soit encore avec les textes et par les textes. Qu’au nom cité de chacun des grands écrivains (il ne peut guère être question que de ceux--là dans nos écoles primaires même supérieures) soit et demeure attaché quelque chose de lui, de son œuvre, un passage significatif, caractéristique ; que le souvenir de ce passage protège et porte le nom ; qu’il le précise et le distingue. L’histoire littéraire cessera alors d’être une simple nomenclature confiée à la seule mémoire ; les autres facultés seront appelées à s’y intéresser, à en tirer profit.

Si cette méthode est la seule qui convienne, qu’on juge par