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REVUE PÉDAGOGIQUE

est plus essentiel de parler aux yeux que dans tout autre » ? N’est-ce pas là la méthode moderne, qui consiste « à faire comprendre la géographie par les livres, faire voir la géographie par les cartes » ? — S’agit-il de l’idée fondamentale qui doit respirer le savant et le guider dans ses travaux ? À un siècle de distance, la même conception se retrouve. Le but que doit se proposer le géographe, c’est, en quelque sorte, d’animer la science qu’il enseigne par un double travail d’analyse et de synthèse, en décomposant d’abord la géographie pour en faire connaître toutes les parties[1], et en la reconstituant ensuite pour en faire voir l’ensemble et l’harmonie. « Que serait la géographie, dit la préface de l’Atlas, si, bornée à la connaissance des lieux, elle ne nous attachait pas par l’idée qu’elle doit nous donner de la variété de leurs productions et de leurs habitants ? L’analyse, qui nous éclaira par ses distinctions, qui nous montra dans un même objet la liaison et la différence de ses rapports, qui sut si bien les déterminer en les séparant, peut aussi nous égarer lorsqu’elle est portée à l’excès, n’offrir qu’un squelette décharné au lieu d’un tableau que le coloris des chairs devrait animer, et substituer une nomenclature aride à l’intérêt d’une étude faite pour amuser. »

Nous croyons inutile d’insister davantage sur des rapprochements qu’il serait facile de multiplier. Il nous suffit d’avoir recommandé par quelques citations un vieux livre qui ne mérite peut-être pas de tomber tout à fait en oubli. Il peut, par un exemple particulier, contribuer à montrer comment les méthodes les plus nouvelles se rattachent toujours par quelque endroit à d’anciennes théories. Nous nous garderons d’en conclure que « tout a été dit et que l’on vient trop tard » ; mais le mot de La Bruyère fût-il vrai en pédagogie, on pourrait encore s’en Consoler, car si tout a été dit, il reste beaucoup à faire.

  1. « Ces différentes manières d’être ne sont que les membres épars d’une même science. Il faut rapprocher ces membres afin de donner au corps son unité et sa vie ; chercher les liens qui unissent les parties les unes aux autres pour s’élever jusqu’à la conception de l’harmonie générale. » (M. Levasseur.)