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LA PRESSE ET LES LIVRES

pardon à MM. Ammann et Coutant), c’est le grand souci de l’enseignement primaire, même à l’école normale, où nos programmes sont si chargés, si touffus, où il y a tant de choses à apprendre et en si peu de temps.

De l’enseignement de la langue dans les écoles élémentaires. Ouvrage destiné à servir de guide aux instituteurs et aux institutrices, d’après R. R. Ruegg, professeur à l’université de Berne, par C. Breuleux, directeur de l’école normale de Porrentruy (Suisse). Lausanne, Imer et Payot, éditeurs, 1883. — « Partout, dit l’auteur de cet ouvrage, dans les pays où l’on parle français, les instituteurs et les pédagogues les plus distingués recherchent depuis longtemps les moyens d’enseigner cette langue avec intelligence, de manière à développer les facultés intellectuelles des élèves tout en les instruisant, de façon aussi à les intéresser à l’étude souvent bien aride et bien sèche de notre idiome. »

Il n’y a pas qu’en Suisse que le problème d’un enseignement de la langue maternelle à la fois intéressant et fructueux pour le développement intellectuel et moral se pose et appelle une solution meilleure que celles qui ont été données jusqu’ici. MM. Larousse, Michel et Rapet, que cite M. Breuleux, et bien d’autres qui n’ont pas conquis la même notoriété, ont cependant produit sur la matière des ouvrages de valeur. Mais, d’une part, presque tous visent plutôt les cours moyen et supérieur que les classes élémentaires ou d’initiation. D’autre part, beaucoup aussi, sacrifiant à une fâcheuse tradition, à un préjugé profondément enraciné chez nous, se préoccupent plutôt de la grammaire et de ses règles que de la pratique même de la langue.

Si l’enseignement grammatical est nécessaire dans les classes de degré supérieur, il est prématuré dans les petites. Là, en effet, il ne s’agit pas de raisonner la langue, mais de l’apprendre, de former les enfants « à comprendre exactement les pensées d’autrui, à exprimer clairement et correctement leurs propres pensées ». Pour arriver à ce résultat, que faut-il ? « Faire à l’école ce que fait la mère ou le père de famille. Il faut continuer à l’école l’œuvre qui a été commencée à la maison paternelle », faire beaucoup d’exercices oraux, en recourant toujours, comme la mère, aux procédés intuitifs. « Ce n’est pas seulement pour apprendre à son enfant à prononcer des mots, à faire des phrases, qu’une mère l’exerce à parler ; c’est aussi pour lui apprendre à connaître de nouvelles choses. En même temps qu’elle lui apprend à prononcer un nouveau mot, elle lui montre la chose que ce mot désigne… »

L’enseignement élémentaire de la langue sera donc intuitif. Et c’est là l’un des caractères distinctifs de la méthode que propose d’employer M. Breuleux ; l’étude des choses marchera de front et dans une mesure voulue avec celle des mots, des mots prononcés,