Page:Revue pédagogique, second semestre, 1883.djvu/121

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Et d’abord, pour partir de l’a b c, on avait été frappé à Port-Royal du temps que les enfants dépensaient pour apprendre à lire et de la peine que leur donnaient ces premiers commencements. Pascal crut en trouver la principale cause dans ce fait que la méthode suivie d’ordinaire n’était rien moins que rationnelle. On donnait aux consonnes considérées seules une appellation autre que celle qu’elles ont quand elles sont unies à des voyelles, et comme elles ne se présentent dans le discours qu’unies à des voyelles, de là une double tâche et une grande difficulté. Pour y remédier, il voulait qu’on ne fit d’abord prononcer aux enfants que les voyelles et les diphthongues seulement (ces dernières, d’une seule émission de voix), et non les consonnes, « lesquelles il ne leur faut faire prononcer que dans les diverses combinaisons qu’elles ont avec les mêmes voyelles ou diphthongues, dans les syllabes et les mots (ou en y ajoutant seulement l’e muet)[1]. » Voilà le grand principe de la nouvelle méthode, avec nouvelle appellation des lettres, be, ce, de, et sans épellation, c’est-à-dire sans décomposition de tout ce

  1. Billets que Cicéron a écrits tant à ses amis communs qu’à Attique son ami particulier, avec une méthode en forme de préface pour conduire un écolier dans les lettres humaines, par Guyot, 1668. — Cette préface aurait pour nous un intérêt direct ; car Guyot y traite en détail du cours des études et des innovations qu’il convient d’y apporter. Malheureusement elle est devenue introuvable. Barbier, qui a rédigé une notice sur Thomas Guyot, insérée au tome IV du Magasin encyclopédique de 1813, la cherchait déjà. « Les recherches les plus actives, dit-il, n’ont pu encore me procurer la première édition des Billets de Cicéron, en tête de laquelle se trouve une méthode en forme de préface pour conduire un écolier dans les lettres humaines. Elle est cependant indiquée dans le privilège des éditions postérieures à la première : un esprit de parcimonie trop commun chez les libraires de ce temps-là aura empêché de reproduire ce morceau qui doit contenir des réflexions dignes de la gronde expérience de l’auteur. » Nous l’avons nous-même vainement cherchée dans toutes les bibliothèques de Paris : nous avons bien trouvé à la Bibliothèque nationale un exemplaire de cette première édition ; mais la préface en avait été enlevée ! — Cependant M. Sainte-Beuve l’a eue entre les mains, puisqu’il en cite d’assez longs extraits au livre IV, chapitre ii, de son Port-Royal. Nous nous sommes alors adressé à M. Troubat, ancien secrétaire de M. Sainte-Beuve, actuellement bibliothécaire du palais national de Compiègne, qui nous a appris que le précieux exemplaire qu’avait eu M. Sainte-Beuve avait été détaché du lot de Port-Royal, parce que c’était un bijou de livre, relié en maroquin, à tranches dorées, avec les armes de M. le chevalier de Rohan et la signature de M. Sainte-Beuve en tête, et vendu, en mai 1870, 64 francs, mais qu’il ne savait à qui ??? Nous serions très reconnaissant à son heureux possesseur, s’il voulait bien nous le communiquer.