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ENSEIGNEMENT GRAMMATICAL ET EMPIRIQUE DE LA LANGUE

antécédent un nom ou un pronom à la troisième personne, comme l’enfant a écrit maintes et maintes fois : « celui qui dit », « celui qui fait », « celui qui met », une liaison, inconsciente mais d’autant plus infrangible, s’est nouée dans sa mémoire entre qui et la finale t du verbe qui suit. Il écrira donc « toi… qui met ». Son maître, fidèle à sa doctrine, lui dira : « Dans ce cas on écrit mets, parce qu’il y a toi avant qui », ce qui au surplus est encore l’énoncé d’une règle, mais d’une règle de détail et d’infime portée. On peut se demander ce que l’enfant aura compris, en quoi une telle notion est instructive et aussi ce qu’il aura appris. Si on lui dicte ensuite : Enfant, qui mets toute ton ardeur au jeu, comment du cas précédent inférera-t-il la manière d’écrire mets dans celui-ci ? Un tel maître usera son temps et consumera son zèle dans des recommandations de détail innombrables, très vite ennuyeuses et vouées à un rapide oubli.

Si donc la cause est gagnée contre les contempteurs de toute grammaire, nous nous trouvons aux prises avec ceux qui, sans la supprimer, se contentent de la comprimer et ne veulent en retenir que l’essentiel. Voyons donc ce qui, dans l’exemple ci-dessus, constitue l’essentiel. Pour corriger le mot met et faire comprendre l’orthographe mets, l’instituteur fait chercher le sujet ; il faut que l’enfant sache ce qu’est un sujet et comment on le trouve. Le sujet est qui : il s’agit d’en déterminer la personne ; de toute nécessité cela suppose une leçon sur les trois personnes. Mais qui n’est par lui-même d’aucune personne ; pronom, il a celle du nom dont il tient la place : l’enfant doit donc savoir ce qu’est un pronom, particulièrement ce qu’est ce pronom qui et qu’il tient la place de son antécédent. Toutes ces connaissances seraient inutiles s’il n’a pas appris aussi