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ENSEIGNEMENT GRAMMATICAL ET EMPIRIQUE DE LA LANGUE

directe, celle qui se propose essentiellement d’éviter toute traduction, d’astreindre, d’habituer l’élève à penser en langue étrangère, de lui donner dans cette langue l’éducation qu’il a reçue en français.

Très vite une confusion s’établit dans l’esprit du public et même dans celui de beaucoup de maîtres : comme les réformateurs s’en prenaient, en même temps qu’à la traduction, à l’enseignement grammatical, on fit l’expression « méthode directe » synonyme de répudiation de toute grammaire. Par contagion du secondaire au primaire, on se mit h prôner la méthode directe dans l’enseignement du français. On voit l’erreur : comment peut-on parler d’enseignement direct du français à des Français ? A-t-il pu jamais être autre que direct, puisqu’on enseigne le français en français ? Un contresens, à tout le moins, est a l’origine d’une telle illusion. On peut bien donner cet enseignement avec ou sans grammaire : dans l’un comme dans l’autre cas il est au même titre un enseignement direct. Lorsque les jésuites enseignaient le latin en latin, il suivaient certes la méthode directe, mais sans se priver aucunement du secours de la grammaire, tant ce sont choses distinctes que la méthode de traduction et la méthode grammaticale ! N’empêche que la confusion qu’on en fit nuisit gravement à l’étude de la grammaire française et que ceux que l’on nous permettra d’appeler les abolitionnistes utilisèrent, injustement, mais avec succès, le prestige de la méthode directe contre la méthode grammaticale, qui n’est cependant pas incompatible avec elle.

Pratiquement la conséquence fut, par exemple, la suivante. Au lieu d’enseigner aux enfants cette règle abstraite et générale : les verbes du premier groupe se terminent par e à la première personne du singulier du présent de