Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1909.djvu/46

Cette page n’a pas encore été corrigée
38
REVUE PÉDAGOGIQUE

qu’il ne leur manque aucune des facultés utilisées et cultivées par notre enseignement ; ils ne voient pas ; mais leurs camarades ne doivent pas regarder. Leur mémoire verbale se développe naturellement beaucoup, ce qui convient à un enseignement grand assembleur de mots et contempteur d’images. L’Université est une douairière qui parle bien, mais qui a la vue basse… » Et M. Hourticq poursuivant son propos, « parmi les nombreux maîtres, dit-il, qui parlent successivement devant les élèves, celui-là seul exerce sur eux une forte empreinte qui est le plus souvent avec eux et leur enseigne une matière importante du programme. Ce n’est jamais le professeur de dessin. Au maître de littérature, d’histoire ou de sciences, il revient de mêler constamment à son enseignement des notions plastiques et l’usage du dessin ; l’éducation tout entière doit être imprégnée de préoccupations visuelles ; alors on apprendra à dessiner comme on apprend à lire et à écrire, sans y songer. Le professeur de dessin n’aura plus qu’à enseigner la syntaxe de cette langue entrée dans l’usage. » Tant qu’on n’en sera pas venu là, il n’y aura rien de fait et rien ne se pourra faire. En somme, d’après M. Hourticq, la réforme de l’enseignement du dessin doit être précédée par une réforme générale de l’esprit, des visées, des procédés de tous les enseignements divers. Ce n’est pas peu.

On entend bien que M. Hourticq ne s’est pas interdit de se jouer en écrivant son article. Tout de même il y a quelque chose à en retenir, Quand il dénonce le verbalisme de l’enseignement secondaire, la critique est outrée, mais ne porte pas complètement à faux, et il est très bien de vouloir qué l’Université s’applique à ne plus « sacrifier chez ses élèves toute la part d’intelligence et de sensibilité qui est commandée par le sens visuel ». Il faut reconnaître aussi qu’il serait excellent « que les professeurs d’histoire ou de lettres fussent dessinateurs », qu’il y aurait profit pour la culture générale des enfants, si ces maîtres savaient « expliquer au tableau la théorie du temple grec, ou mème les mérites plastiques de l’École d’Athènes ». Mais on n’en est pas là, il s’en faut ; la transformation du personnel enseignant, que M. Hourticq appelle de ses vœux, ne peut se faire en un jour ni d’un seul coup. C’est une entreprise de longue haleine. En dépit de M. Hourticq, il re nous semble pas que la réforme