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REVUE PÉDAGOGIQUE

cependant sacrifié l’autorité d’une façon absolue, mais que, très sagement, ils visent plutôt à la conciliation des deux principes. Les réformateurs trouvent aussi un groupe d’adversaires chez ceux qui ne veulent pas entendre parler d’enseignement attrayant. Vouloir que les enfants prennent du plaisir à dessiner, c’est, à leur compte, faire un amusement de ce qui doit être une étude. Ils rappellent le temps où le dessin était tenu pour un art d’agrément et ils montrent le néant des résultats alors obtenus. — À vrai dire, la méthode Guillaume a rendu service en réagissant contre cette conception du dessin ; mais n’a-t-elle pas poussé la réaction trop loin, quand elle en a fait presque un « art de désagrément » ? Il n’est pas douteux non plus que l’enseignement attrayant comporte des abus qu’il faut éviter, qu’il est une mesure où il doit se tenir, qu’il y aura toujours une part de vérité dans l’opinion de Galiani soutenant qu’une des fins de l’éducation, c’est d’apprendre aux enfants à supporter l’ennui. Mais, tout pesé, les abus de l’enseignement attrayant ne sont pas inévitables ; il n’est pas du tout impossible qu’il garde la juste mesure. D’autant que cette sorte d’enseignement ne date pas d’hier ; depuis l’époque où les maîtres d’école de la Rome antique donnaient aux petits enfants des lettres figurées en ivoire pour qu’ils apprissent l’alphabet en se jouant, on a eu tout loisir de le mettre à l’épreuve, d’en observer le fort et le faible, et il est devenu assez aisé de se garder des inconvénients qu’il peut offrir.

Ces objections, comme on le voit, ne s’appliquent pas spécialement à la méthode nouvelle d’enseignement du dessin, mais à des tendances générales de la pédagogie moderne. Il en est d’autres qui serrent le sujet de plus près, qui ont un caractère plus topique. Celles-là viennent plutôt du côté des artistes que des éducateurs. « Vous prétendez, dit-on aux réformateurs, donner une éducation esthétique aux écoliers, former en eux le sens des choses de l’art, développer le goût du beau. Bone Deus ! quelle malencontreuse entreprise ! Ne trouvez-vous donc pas qu’il est déjà assez de gens qui, à tort et à travers, se mêlent de juger les tableaux et les statues ? Cette engeance insupportable de dilettantes instruits moins qu’à moitié, grâce à vous, nous allons la voir pulluler plus encore. Il y a pire, vous mettez à la disposition de vos jeunes élèves tout le matériel de l’artiste ; vous les