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LE MAÎTRE D’ÉCOLE SOUS L’ANCIEN RÉGIME

aux procès-verbaux des visites épiscopales où se répète, à l’état de formule, cette plainte de l’archevêque : « Le vicaire tiendra les petites écoles, — ou les tiendra plus exactement, à peine de saisie de son temporel. » De son côté, M. Léon Boutry a trouvé mention, dans un procès-verbal d’enquête au bailliage criminel d’Alençon, d’une classe dirigée par un prêtre habitué. Un élève âgé de seize ans en était sorti sans savoir lire, et trois enfants de quatorze ans déclaraient ne savoir signer. Un enfant de douze ans commençait à former ses lettres[1].

En 1789, les cahiers du tiers fournissent nombre de doléances dans le style de celle des Andelys : « Nous demandons que des écoles soient établies pour la jeunesse, vu que les chapelains ne veulent rien faire. » On pourra citer de-ci de-là des vicaires qui poussaient le zèle jusqu’à enseigner le latin aux enfants des moindres villages. Il est plus naturel de supposer que, dans l’ensemble, les classes des ecclésiastiques n’étaient pas les meilleures : les pratiques religieuses y devaient être l’objet de soins excessifs et les exercices scolaires trop souvent sacrifiés aux soins du ministère auquel, en définitive, les maîtres étaient voués avant tout.

Tentatives de recrutement régulier. — L’une des tentatives les plus intéressantes faites pour le recrutement régulier des maîtres d’école fut l’œuvre d’un prêtre de Lyon, Charles Démia. Nommé en 1674 directeur général des écoles de cette ville, Démia reconnut que la plupart des maîtres et maîtresses « ignoraient non seulement la méthode de bien lire et de bien écrire, mais encore les principes de la religion ; que parmi les maîtres il y en avait d’hérétiques, d’impies, et qui avaient exercé des professions infâmes, sous la conduite desquels la jeunesse était dans un danger évident de se perdre ». Pour mettre fin à cet état de choses, Démia établit un séminaire de jeunes gens destinés à exercer, dans les paroisses, la double fonction de vicaires et d’instituteurs. De bonne heure, il eut à éprouver de nombreuses défections, même parmi ses meilleurs sujets, et son entreprise échoua.

  1. Léon Boutry, L’enseignement primaire et la monarchie, p. 42.