Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1904.djvu/266

Cette page n’a pas encore été corrigée
254
REVUE PÉDAGOGIQUE

critiques qu’il dirige contre ces dernières, il importe de connaître le jugement qu’il formule sur les premières.

Il adopte comme principes fondamentaux ces deux idées, émises le 10 février 1898 par M. Lourties, rapporteur au Sénat de la loi du 1er avril 1898, qui réorganise les sociétés de secours mutuels : 1° « les sociétés de secours mutuels étant des sociétés d’assurances » il faut établir une cotisation afférente à chaque risque à garantir et de plus réaliser « une péréquation exacte des recettes et des dépenses pour chaque risque » (p. 20). — 2° « la mutualité est et doit être avant tout, non pas une œuvre d’assistance, mais une œuvre de prévoyance. L’intervention des membres honoraires et de l’État ne doit se produire qu’après pour majorer la prime et permettre au travailleur de s’assurer une vieillesse digne de lui, après toute une vie de labeur et d’épargne » (p. 21).

De ces deux principes dérivent les critiques dirigées par M. Lépine contre l’organisation des Sociétés de Secours Mutuels en général : il condamne d’abord « la forme donnée jusqu’ici aux secours de maladie », puis « la constitution de la retraite par le fonds commun » inaliénable (p. 25). Les secours de maladie ne sont pas alimentés par des cotisations spéciales, d’où impossibilité d’assurer la péréquation des recettes et des dépenses. Le fonds commun inaliénable est alimenté par les dons des membres honoraires et par les subventions de l’État ; d’où confusion de l’assistance et de la prévoyance (p. 26).

Il est vrai que la loi du 1er avril 1898 a introduit le livret individuel « comme l’égal du fonds commun » (p. 42). Malheureusement les sociétés existantes en 1898 ont témoigné une certaine indifférence à l’égard de ce nouveau mode de constitution des retraites, bien supérieur à l’ancien, déclare M. Lépine, car il repose exclusivement sur la prévoyance personnelle. Elles préfèrent « le système du fonds commun » (p. 43), mais ce dernier présente un grave inconvénient : le fonds commun inaliénable est comme un vaste réservoir où vont se confondre les cotisations des membres honoraires, les dons et legs, les subventions de l’État. La répartition de ces libéralités constitue, aux yeux de M. Lépine, une double injustice : 1° parce qu’étant égale et uniforme, profitant aux nécessiteux comme aux non nécessiteux, elle diminue la part des premiers, et pousse les seconds à l’impré-