Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1893.djvu/461

Cette page n’a pas encore été corrigée
453
CHARLES BIGOT

versité n’avait pas comme aujourd’hui des maîtrises de conférences dans les facultés à leur offrir, pour leur permettre de mettre aussitôt en œuvre leur acquis, et de faire leurs thèses en attendant des chaires d’archéologie ou de littérature grecque. C’étaient des chaires de lycées qu’on leur donnait, et non pas toujours supérieures à celles qu’ils auraient eues au sortir de l’École normale. Il fut professeur de rhétorique à Cahors, et bientôt après à Nevers. C’était un grand luxe que de donner de tels maîtres à de si modestes écoliers ; mais quelle bonne fortune pour ceux-ci, quand ils se trouvaient avoir de l’étoffe ! Bigot eut sur plusieurs une influence décisive, et tous ont gardé de lui un vivant souvenir.

Il professait la rhétorique à Nîmes en 1870-71. Exalté par nos désastres, ardemment en quête des moyens de panser nos blessures, son patriotisme se trouva à l’étroit dans une classe. Il crut user d’un droit élémentaire, ou plutôt remplir un devoir civique, en prenant publiquement et résolument part aux luttes politiques du moment, car elles mettaient en danger la liberté, en dehors de laquelle il ne voyait point de salut pour le pays. Mais, comme la liberté était menacée précisément par le pouvoir qui avait, on ne peut dire la garde des institutions, mais la charge de suppléer aux institutions en ruine, c’était chose hardie à un fonctionnaire que de se réclamer d’elle avec cette décision et de prendre sa défense dans la presse. Les articles de Bigot dans le Gard républicain furent incriminés par ses chefs, et il donna sa démission.

La Gironde se l’attacha aussitôt. Il s’y révéla journaliste aussi ferme qu’élégant, d’une fécondité, d’une facilité, d’une variété de ressources qui n’avaient d’égale que la sûreté de son caractère et la dignité de sa plume. Ces qualités grandirent encore à Paris, où le Siècle l’appela dès l’année suivante. Elles parurent dans leur éclat au XIXe Siècle, durant les années où il fut avec About et Sarcey une des colonnes de ce journal, qui était lui-même, on s’en souvient, au tout premier rang de la presse française par l’étendue de son influence, comme par la valeur de sa rédaction. Simultanément ou par la suite, Bigot écrivit aussi dans le Gagne-Petit et la République française, puis dans les revues les plus diverses. A la demande d’Eug. Yung, il donna à la Revue poli-