Page:Revue pédagogique, premier semestre, 1891.djvu/346

Cette page n’a pas encore été corrigée

À PROPOS DE L’INSTRUCTION DES INDIGÈNES EN ALGÉRIE


[La lettre qu’on va lire a été adressée il y a environ un an par Mme C. Coignet, qui venait de visiter un certain nombre d’écoles en Algérie, à M. le directeur de l’enseignement primaire. Cette communication fut transmise aussitôt au Comité de la Revue pédagogique, qui crut devoir alors en ajourner l’insertion : il était nécessaire, en effet, avant de livrer cette lettre à la publicité, de connaître l’avis des autorités scolaires algériennes ; il convenait, en outre, d’attendre les résultats de l’enquête approfondie qui allait être faite sur les écoles de l’Algérie, en vertu d’une mission spéciale du ministère de l’instruction publique, par un des membres les plus autorisés de l’Université, M. Alfred Rambaud. Après la discussion qui a eu lieu tout récemment au Sénat, l’attention publique ayant été appelée sur l’Algérie d’une façon toute particulière, le Comité de la Revue, saisi de nouveau de la question dans sa dernière séance mensuelle (19 mars 1891), a été d’avis qu’il y avait lieu de publier la lettre de Mme C. Coignet, à titre de document pouvant contribuer à éclairer la situation qu’étudie en ce moment une commission sénatoriale. — La Rédaction. ]

Tunis, lundi 17 mars 1890.
À M. Buisson, directeur de l’enseignement primaire au ministère de l’instruction publique.

Monsieur le Directeur,

Selon votre demande, j’ai visité pendant mon séjour en Algérie, avec une sérieuse attention : les deux écoles indigènes d’Alger, celle de Milianah, les deux écoles mixtes et indigènes de Fort-National et du hameau qui y touche, l’école mixte et l’école de filles indigène à Bougie, l’école indigène de garçons à Toudja près Bougie, l’école mixte de Biskra, les écoles indigènes du Vieux Biskra, d’El-Kantara et de Sidi-Okhba, les écoles israélites, indigènes et arabes de Constantine, filles et garçons. Je me suis entretenue avec les membres de l’enseignement qui s’y rattachent.

La plainte générale des instituteurs, c’est l’irrégularité des travaux scolaires, l’écart entre le nombre des présents et des inscrits. Aussi demandent-ils pour la plupart la pratique de l’obligation, n’y voyant aucun inconvénient sérieux du côté des indigènes. Les motifs de l’irrégularité et de l’abstention tiennent, à leurs yeux, à la mollesse et à l’insouciance de la nature arabe, et aussi à une vague défiance et à la crainte de l’opinion des leurs.