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REVUE PÉDAGOGIQUE

lectures. C’est surtout en dehors des études qu’on peut le faire fructueusement ; en promenade, pendant les récréations, il est facile au maître de s’informer auprès d’un groupe d’élèves des ouvrages lus par eux, de leur demander leur impression sur ces ouvrages, de les mettre à l’aise pour qu’ils en parlent librement. Je vois à cela un triple avantage d’abord les élèves apprennent à exprimer leur pensée en surveillant leur langage souvent trivial ; ensuite plusieurs profitent des lectures d’un seul ; enfin le maître trouve là une précieuse occasion de contrôler le profit que les élèves tirent des lectures, de connaître la tournure d’esprit et le goût de chacun, de rectifier des jugements douteux, et, sans imposer aucun ouvrage, de diriger les élèves dans le choix des livres à lire. Ce moyen d’encouragement et de contrôle n’en exclut pas un autre tout aussi indispensable, celui qui consiste à demander aux élèves, à tour de rôle, de faire en classe le compte-rendu oral d’une lecture ; cet exercice est utile à toute la classe qui profite et du compte-rendu et des observations auxquelles il donne lieu ; un quart d’heure peut y être consacré au début de chaque leçon de lecture. Pour varier cet exercice, le maître demandera parfois la simple indication des passages qui, dans un ouvrage, ont attiré l’attention d’un élève ; il indiquera lui-même d’autres passages également dignes d’être remarqués ; parfois enfin il pourra demander aux élèves, mais à titre facultatif, de lui réciter quelques vers, quelques lignes appris spontanément ; il suffit qu’on le leur demande, que l’un d’eux commence, et ils mettent une sorte de point d’honneur à apprendre les plus beaux passages. C’est également en classe que le maître peut, par la seule lecture d’un morceau bien choisi, inspirer aux élèves le désir de connaître un ouvrage que jusque-là ils n’avaient pas songé à lire. En ayant soin de varier les lectures et les exercices auxquels elles donnent lieu, on empêche la routine de s’y introduire à chaque instant on donne à cet exercice un regain de nouveauté qui stimule les élèves et entretient chez eux une saine émulation.

Comme on le voit, le rôle du maître est ici considérable ; c’est en grande partie de lui que dépendent et l’ardeur que les élèves mettent à lire et le fruit qu’ils tirent de leurs lectures.

Plusieurs de nos correspondants recommandent comme un moyen des plus efficaces des lectures d’auteurs faites par les maîtres devant les élèves. M. André, professeur à l’école normale de Rennes, nous écrit :

Il est un moyen trop peu employé dans les écoles normales, qui me semble très propre à développer chez des jeunes gens le goût de nos grands auteurs. C’est la lecture expressive, bien faite par un maître, des meilleures pages de notre littérature. Quand un lecteur sent bien les beautés d’un morceau littéraire et qu’il est capable d’en rendre toutes les nuances en le lisant à haute voix, il lui est