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DE LA MANIÈRE
D’ENSEIGNER LES PREMIERS ÉLÉMENTS DU FRANÇAIS
DANS LES ÉCOLES DE LA BASSE-BRETAGNE


On trouve encore en France des pays dont les habitants ne comprennent ni ne parlent la langue française, celle dans laquelle leur sont prescrites leurs obligations d’hommes et de citoyens : c’est à savoir les Flamands dans une partie des arrondissements de Dunkerque et d’Hazebrouck, les Basques dans les Pyrénées, et particulièrement les Bretons de la Basse-Bretagne (le département du Finistère tout entier et la moitié environ de ceux des Côtes-du-Nord et du Morbihan, moins toutefois les habitants des villes et les marins de la côte). Sans doute il y a bien d’autres contrées où les paysans parlent des patois qui ne ressemblent guère à la langue française ; mais ces patois ne sont que des dialectes de l’ancienne langue romane, dont les mots profondément altérés quelquefois dans leur forme ont cependant conservé leur racine : aussi le sens s’en retrouve-t-il facilement. Malgré l’accent local et les vices de prononciation, celui qui sait le français les comprend assez vite, et les enfants, à leur tour, quand ils viennent à l’école, comprennent vite le maître. Il est rare d’ailleurs qu’on n’y trouve pas quelques personnes qui ont quitté le pays, ou qui ont reçu une certaine instruction, et qui y entretiennent la pratique de la langue française. Et puis c’est en français que les élèves y récitent le catéchisme, que s’y donne l’instruction religieuse, que s’y font les sermons à l’église. Il en va tout autrement dans les pays cités plus haut : le flamand, le basque et le breton ne sont pas des patois, ce sont des langues ; la langue bretonne notamment semble n’avoir rien de commun avec la langue française, ni pour la valeur de ses mots, ni pour les tours ou le génie de sa phrase ; d’autre part, le paysan breton s’expatrie peu ; enfin c’est en breton que se font les catéchismes et les sermons. Aussi les paysans ne connaissent-ils pas d’autre langue, et un Français fait des lieues à la campagne dans toute la Basse-Bretagne sans rencontrer un être humain dont il puisse se faire comprendre autrement que par