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LÉONCE PERSON

prouvait par l’intérêt qu’il avait pour tout ce qui touche cet ordre d’enseignement. Les élèves de son père étaient ses amis et le regardaient, malgré la différence des rangs, comme un des leurs.

Entré à l’École normale supérieure en 1863, il fut, à sa sortie, envoyé à Cren, puis bientôt rappelé à Paris, où il enseigna successivement dans divers lycées, toujours prêt à se charger de la tâche la plus lourde et la plus difficile. C’est ainsi qu’il fit longtemps au lycée Saint-Louis les cours de lettres aux candidats à Saint-Cyr. Il se tirait à son honneur de cette besogne ingrate, grâce à sa constante bonne humeur et à l’agrément qu’il savait jeter dans ses leçons par des connaissances de plus d’une espèce. Il savait se faire tour à tour historien, géographe, technicien, naturaliste, de sorte que l’attention était toujours tenue en haleine. Mais le goût dominant de Léonce Person était pour les études de linguistique, et c’est par là qu’il m’a été donné de le bien connaître. Dès l’École normale, il avait choisi de son propre gré la section de grammaire, dont il avait été le chef. Il suivit en 1865-66 le cours de grammaire comparée au Collège de France, et depuis lors il ne se passa pas d’année où il ne fit à ce cours des apparitions plus ou moins prolongées, quelquefois des visites régulières pendant tout un semestre.

C’est lui qui, rendant compte il y a trois ans dans ce journal de quelques leçons qu’il avait recueillies, signait « a Un étudiant de 18e année ». Ses comptes-rendus, où il mettait toujours quelque chose de lui-même, montrent combien les questions de philologie lui étaient devenues familières. On a pu juger également de son expérience grammaticale et de sa fécondité d’invention par les livres d’Exercices que son amitié pour moi lui a fait composer.

En ces dernières années, un événement de famille lui ayant procuré l’aisance, il a pu donner satisfaction aux goûts non moins variés qu’élevés de sa généreuse nature. Nous l’avons vu alors publier tour à tour, en d’élégantes brochures, une étude sur Rotrou, où il montrait que le Saint-Genest de ce poète est une imitation de l’espagnol ; une biographie de Rotrou, lequel lui tenait à cœur parce qu’il était Chartrais comme lui ; des études sur des questions d’enseignement, et jusqu’à une notice sur la bataille de Waterloo, qu’un voyage de vacances l’avait amené à étudier sur le terrain. Mais au milieu de de ces travaux accessoires, qui étaient plutôt des distractions, il continuait de se vouer avec la même ardeur à se classe, et il y ajoutait des conférences faites au grand public, à la jeunesse de son arrondissement, malgré les exhortations d’amis qui, le voyant entreprendre tant de choses, l’engageaient à se modérer.

C’est encore lui qui, il y a peu de mois, a lancé cette idée du latin à l’école normale primaire, qui a occupé le Conseil supérieur de l’instruction publique, et qui, momentanément écartée, continuera son chemin et est destinée à renouveler l’enseignement de la langue française donné à nos instituteurs. Il s’offrait à faire l’expérience,