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ÉTUDE ET ENSEIGNEMENT DE LA GÉOGRAPHIE EN FRANCE

et fait parler de manière à en arracher les pages précises de leur histoire[1]. »

Quoiqu’il en soit, la géographie en elle-même ne pouvait que gagner à cette lutte de deux écoles[2] qui se posaient en face l’une de l’autre, la première se rattachant aux traditions de Ritter, la seconde suivant l’impulsion nouvelle que Peschel voulait imprimer à la science. De ces discussions fécondes devait sortir en définitive un système plus complet et plus sûr, car il reposait sur un principe contre lequel rien ne pouvait dès lors prévaloir. Ritter n’en est pas moins le chef incontesté de ce grand mouvement qui poussa l’Allemagne au premier rang des nations savantes de l’Europe. Ceux-là mêmes qui se sont faits plus tard les adversaires de ses doctrines ont toujours été plus ou moins pénétrés de son esprit ; et tous les grands noms que la science géographique compte au delà du Rhin, dans la seconde moitié du xixe siècle, se rattachent plus ou moins directement au maître de l’Université de Berlin, depuis Berghaus, Petermann, Kiepert et Sydow, ses disciples immédiats, jusqu’à Wappœus, Behm, Kirchhoff, Wagner et Osc. Peschel lui-même. Nous avons nommé les sommités dont s’honore l’Allemagne, à juste titre : nous ne pouvons que nous incliner devant ces savants de premier ordre qui ont mis hors de pair en Europe la science géographique allemande.

Nous nous reprocherions, en présentant ce tableau sommaire, de ne pas mentionner l’Institut géographique de Justus Perthes, fondé à Gotha par le Dr Petermann, et qui tient une grande place dans ce mouvement géographique accompli au centre de l’Europe. On lui doit une des plus belles œuvres cartographiques des temps modernes. au moins en ce qui concerne la représentation des pays européens, l’Atlas de Stieler, et une revue de premier ordre, qui reste encore sans rivale, les Mittheilungen[3]. Se rend-on compte de la somme d’efforts, de talent et de science qu’il a fallu dépenser pour exécuter ces cartes, monuments uniques en leur genre et qui sollicitent l’admiration du plus ignorant en matière géographique : car on ne sait ce que l’on doit le plus louer, de l’abondance ou de la précision des détails, de la beauté de l’exécution ou de la science consommée des auteurs. Ce n’est que petit à petit, et grâce à une amélioration constante apportée dans le détail, qu’une œuvre de ce genre peut se composer et arriver à une telle perfection ; et il lui a fallu le concours des professeurs les plus érudits et les plus savants.

Devrons-nous nous étonner de la grande place que s’est faite au-

  1. Daubrée, Études expérimentales pour expliquer les déformations et les cassures qu’a subies l’écorce terrestre.
  2. Rob Mayr : Zeitschrift für Geographie, Wien, I, 1880. — H. Wagner Geographisches Jahrbuch, VIII. Band, 1860.
  3. Fondée en 1855.