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REVUE PÉDAGOGIQUE

disent ceux qui, trompés par l’effroyable abaissement où sont tombés les indigènes d’Algérie par suite de la suppression de tout enseignement sérieux, pensent que l’esprit musulman est rebelle à toute innovation : c’est là, en effet, une erreur démentie par les faits ; l’islamisme, comme toutes les religions, a eu et a encore ses novateurs, voire même ses libres-penseurs, et il serait sans doute possible de restaurer un de ces foyers de science qui jetèrent jadis un si vif éclat sur la civilisation arabe. Mais pour cela il faudrait que l’administration de l’instruction publique concentrât ses efforts sur un seul point, qu’elle ne laissât subsister qu’une seule des trois medraça existantes ; celle de Tiemcen est tout naturellement désignée pour être conservée : c’est là qu’Ibn-Khaldoun — le Montesquieu des Arabes — a professé ; c’est là, non loin du Maroc, que nous devons essayer de renouer les traditions interrompues. Mais la medersa de Tlemcen, ainsi transformée, devrait-elle être réduite à n’être une sorte de collège arabe-français où l’on enseignerait notre langue, l’histoire et la géographie, l’arithmétique, etc. ? Nous ne le pensons pas. Il est inutile, en effet, de créer une école supérieure musulmane pour donner un enseignement qui sera tout aussi bien donné dans les écoles qui seront créées en exécution du décret du 13 février. La medersa de Tlemcen, telle que nous la concevons, doit être en Algérie une école des hautes études arabes. Pour y être admis, les étudiants devront justifier, sinon du diplôme de bachelier, au moins du certificat d’études primaires. On évitera de cette façon de confier des fonctions judiciaires à des magistrats indigènes qui ignorent notre langue.

Nous sommes persuadé qu’un établissement de ce genre, dirigé par un savant français ayant sous ses ordres des maîtres indigènes soigneusement choisis et sévèrement contrôlés, nous rendrait d’inappréciables services.