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REVUE PÉDAGOGIQUE

« Les enfants qui de ma ferme se rendaient à l’école de l’Arba, continue M. Brihmat, devaient parcourir chaque jour vingt-huit kilomètres. » On avouera que l’obligation de l’instruction serait difficilement applicable dans ce cas et dans les cas analogues. Il est vrai que l’on pourra contraindre les communes algériennes à établir dans les tribus autant d’écoles que l’exigeront les besoins des populations indigènes. Mais on ne saurait songer à placer à la tête de ces écoles des instituteurs français. Ce n’est qu’au prix des plus lourds sacrifices qu’il serait possible de recruter un personnel qui consentit à aller s’enterrer au fond des montagnes kabiles, au milieu de populations barbares et généralement hostiles. On sera donc obligé, par la force des choses, d’étendre à toute l’Algérie, sans distinction de territoires, l’institution des écoles centrales entourées d’écoles préparatoires qui, ainsi que le fait remarquer M. Foncin, s’impose en pays indigène. Ces petites écoles pourront être confiées à des moniteurs indigènes, dont les exigences seront bien moindres que ne seraient celles des maîtres français, car il n’est point besoin d’instituteurs brevetés pour dégrossir cette première génération d’enfants en guenilles que recevront les écoles arabes dans les premiers temps de leur installation et pour enseigner le programme restreint qui sera suivi dans ces écoles. Sur ce point tout le monde est d’accord. Il ne faut pas se dissimuler néanmoins que, quelles que soient les facilités accordées dans le principe aux différentes catégories de maîtres, le recrutement du personnel enseignant sera sans doute longtemps avant de suffire à tous les besoins. Pour parer à cette difficulté, M. Hartmayer, capitaine du bureau arabe de Médéa, auteur d’une intéressante brochure sur la vulgarisation de la langue française chez les Arabes, proposait de placer à la tête des écoles rurales (ou écoles préparatoires) des soldats pris parmi les militaires non condamnés à des peines infamantes qui sont envoyés, à l’expiration de leur peine, dans un des trois bataillons d’Afrique. Ces soldats continueraient à compter respectivement à l’effectif de leur bataillon dont ils seraient détachés ; ils toucheraient à titre de prêt franc leur solde, qui est de 52 centimes par jour y compris l’indemnité en remplacement de viande, soit 15 fr. 60 c. par mois. Cette somme, ajoutée à leur