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L’INSTRUCTION DES INDIGÈNES ALGÉRIENS

et, pour beaucoup d’Américains, ce service qu’elle rend à la nation justifierait à lui seul tout ce qu’elle peut coûter. »

En Algérie, la situation est plus complexe encore, s’il se peut, qu’en Amérique. Les immigrants européens, qui ont entre eux de nombreuses affinités, se trouvent en présence d’une population indigène profondément séparée de nous par la différence de religion, de langage et de race. Dans cette situation, il semble que les efforts de l’administration eussent dû se porter, dès le début de l’occupation, vers l’instruction de ces masses à demi barbares dont l’ignorance et la crédulité constituent l’obstacle le plus sérieux à la consolidation de notre domination. Mais il n’en a malheureusement rien été : on s’est beaucoup plus préoccupé de conquérir tout le pays que d’organiser les parties conquises, et tandis que l’instruction, objet de la sollicitude des municipalités françaises, florissait chez les Européens, l’enseignement indigène, privé de ressources par la confiscation des biens qui lui servaient de dotation, tombait peu à peu au niveau où nous le voyons aujourd’hui.

Au 31 décembre 1882, pour une population de 450,000 Européens environ — y compris 35,000 israélites naturalisés français — on comptait 542 écoles laïques et 1455 écoles congréganistes fréquentées par 50,261 élèves, dont 24,843 garçons et 25,418 filles. — 1,385 élèves garçons suivaient en outre, à la même époque, les cours primaires annexés aux lycées et collèges de l’Algérie.

Dans ses écoles, l’Algérie a devancé les réformes qui ont donné, dans la métropole, une si vive impulsion à l’instruction populaire. Toutes les écoles primaires et les salles d’asile publiques sont depuis longtemps déjà gratuites et les enfants y reçoivent, aux frais des communes, presque toutes les fournitures classiques. Quant à la fréquentation des écoles, elle dépasse, comme nous venons de le voir, le neuvième de la population générale, et il ne semble pas que l’obligation récemment édictée soit de nature à augmenter sensiblement cette proportion.

Outre ses écoles, l’Algérie renferme 197 salles d’asile où 20,997 enfants des deux sexes trouvent place. Enfin, des cours d’adultes au nombre de 147 distribuent l’enseignement primaire à 3,827 auditeurs.