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qu’une affection feinte et ne tiennent qu’au gain. Outre cela, elles s’attacheront davantage à leur progéniture ; « par Jupiter, ajoute Plutarque avec une simplicité charmante, ce n’est pas sans raison : l’action de manger ensemble porte à la bienveillance[1]. » Mais si les mères ne peuvent elles-mêmes donner le sein à cause de leur faiblesse, du moins il ne faut pas choisir les premières nourrices venues. Plutarque veut qu’elles soient Grecques d’origine et de mœurs, afin qu’elles n’élèvent pas leurs nourrissons dans les croyances et les préjugés des barbares ; et qu’on veille soigneusement, suivant la prescription du divin Platon, aux propos qu’elles leur feront entendre, afin que ces jeunes âmes ne s’emplissent pas dès le début de sottise et de corruption. C’est pour la même raison que les petits compagnons qui servent les enfants et sont élevés avec eux doivent « être de bonnes mœurs, savoir bien la langue, et la parler correctement ; des esclaves barbares où corrompus communiqueraient aux enfants les vices de leur langage et de leurs mœurs ; un ancien proverbe dit avec raison qu’on apprend à boiter avec les boiteux[2]. »

Les conseils de Plutarque s’adressent surtout aux familles riches ; car, à ses yeux, la pauvreté apporte trop de modifications dans la vie, elle impose trop de gène, pour que les enfants pauvres puissent être élevés avec la sollicitude, le loisir, l’abondance de ressources que suppose une édycation parfaite et vraiment libérale. Aïnsi Aristote fait de l’aisance une condition presque indispensable de la parfaite vertu[3]. « Je désirerais vivement, dit Plutarque, que

  1. De Liber. Educ., p. 6.
  2. Ibid., p. 7. Voir les mêmes idées dans Tacite, Dialogue des Orat., Ch. xxviii et xxix.
  3. Morale, l. Ier, ch. x.