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REVUE PÉDAGOGIQUE.

cette tâche, la plus positive, la plus efficace, la plus attrayante de toutes leurs tâches et qui pourtant n’a pas encore assez frappé l’attention publique pour mériter l’honneur d’être inscrite dans les programmes officiels.

On peut affirmer que les exercices qui ont pour objet la culture des sens de l’enfant ne sont nullement un jeu futile, un simple intermède à des études sérieuses ; ils sont eux-mêmes des études très-sérieuses et dont les fruits auront plus tard une importance véritable sur le sort de l’homme fait. L’exactitude et la portée de la vue, la délicatesse et la sûreté de la main, la finesse et la justesse de l’ouïe donnent une plus-value considérable à l’artisan par la rapidité et la perfection du travail qu’elles lui assurent. Rien n’embarrasse un tel homme ; il est pour ainsi dire propre à tout ; ses sens cultivés sont pour lui des instruments dont l’usage est universel. C’est au défaut de culture des sens de l’enfant qu’il faut attribuer toutes les maladresses dont nous avons journellement à souffrir de la part des ouvriers, des domestiques, de mères mêmes, qui, sous ce rapport, n’avaient pas été cultivés plus que les autres. Qui sait poser un clou, un tableau, à la place qu’il doit occuper, sans avoir besoin de recourir à tout un arsenal de mètre, règle, fil à plomb ? Et malgré cela combien de mesures prises, reprises, de coups de crayon à la muraille, pour aboutir à un résultat passable, douteux, qu’un œil exercé qualifie du premier regard. On sait pourtant ce que l’on veut ; l’esprit conçoit nettement son objet, mais l’œil et la main sont inhabiles, et trahissent les intentions.

Pour ne parler que de la vue, combien de myopies acquises, de prétendus daltonismes, qui ne sont que le résultat d’une habitude prise de mal regarder, et l’absence de toute indication à l’égard des couleurs, dans les premières