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REVUE PÉDAGOGIQUE.

tout activité, et dont l’activité se nourrit de gaieté et de lumière, a besoin d’essor et d’horizon.

Dans ce grand mouvement de la pédagogie française, quelle a été la part de l’instruction primaire ? Il y avait assurément des écoles primaires avant 89, petites écoles, écoles du dimanche, écoles de charité, plus nombreuses qu’on ne serait d’abord disposé à le croire, mais à l’état isolé, sans lien entre elles, et surtout sans grande connaissance ni grand souci de la pédagogie. Il faut bien l’avouer, ce n’est pas elles que l’on avait en vue : l’écolier dont s’inquiètent les novateurs du xvie siècle, les maîtres du xviie et du xviiie, c’est l’élève des collèges et non celui des écoles. Rousseau lui-même, si voisin de la Révolution française, Rousseau pense ici comme le gentilhomme Montaigne, car Émile a un « gouverneur ». Nous sommes loin de l’école primaire, de l’école gratuite ouverte aux enfants du peuple, aux humbles, aux pauvres. L’idée de l’éducation populaire a eu pourtant son représentant, disons mieux, son apôtre, quelque cinquante ans après que saint Vincent de Paul eut fondé l’Institution des Enfants-Trouvés. L’abbé de La Salle, à travers mille épreuves, avait créé les « Écoles chrétiennes » : on y enseignait ce que le P. Girard appelle les quatre éléments, lire, écrire, compter et réciter. C’était beaucoup pour l’époque, trop peu au regard du temps présent ; la fixité des méthodes, la défense d’innover, dont il ne faut pas trop médire, car ce sont de salutaires préservatifs contre l’invasion d’essais irréfléchis ou prématurés, : n’assurent la perpétuité de la tradition qu’en ralentissant la marche du progrès.

Et cependant, telle est la puissance de l’idée, qu’une fois produite au jour il ne se peut qu’elle ne fasse son chemin : elle pénètre partout, comme le soleil qui luit pour